Que se passe-t-il quand deux frères insultent leur même mère? Voilà une situation bien stupide, gênante pour celui qui y assiste; un jeu ridicule et grotesque qui peut mal tourner. Voilà pourtant le type d'absurdité auquel se livre le Liban et la Palestine depuis quelques décennies et que Ziad Doueiri met très bien en scène à travers cette dispute qui éclate entre les deux protagonistes à partir d'un fait anodin devenant affaire d’État.
De l'insulte nous distinguons en premier lieu le très bon scénario, finement pensé (même si l'on s'attend plus ou moins à certains rebondissements), à la fois spectaculaire et intelligent, politique et populaire, émouvant et réflexif. Cet enchaînement d'actions allant du particulier au général, du local au national, de l'individu au collectif nous entraîne dans la logique néfaste et cruelle de la guerre, avec son lot de rancœurs, de mémoire vive et de plaies encore mal soignées. Tout cela avec, se mirant en chiens de faïence comme dans un miroir, les deux faces d'un seul et unique problème, nourris au même sein de la haine.
Bien sûr, on est parfois dans l'excès, ferveur méditerranéenne oblige: parfois trop pathétique (la musique n'aidant parfois pas), parfois trop emporté (Tony, très bien joué par ailleurs par Adel Karam, mériterait bien sûr de s'en prendre une dans la tête), parfois trop écrit (père et fille au tribunal, c'est peut-être un peu exagéré), parfois trop scandaleux (les mouvements de caméra rappelant à certains moments la télévision la plus racoleuse). Néanmoins, le résultat demeure satisfaisant et a la louable vertu de vouloir servir de catharsis (comme devrait l'être en fin de compte tout jugement) à des peuples ayant du mal à se pardonner.