Lola Montès est un film revenu d'entre les morts ; bide commercial à sa sortie, les producteurs modifient le montage sans l'accord de Max Ophuls, au point que son point fort, sa narration en flash-back, sera supprimée. Le montage original ne fera son retour qu'en 2008, revenant aux intentions premières d'Ophuls.
L'histoire est celle d'une femme jetée en pâture car elle a eu le tort d'aimer quelqu'un d'autre. Son purgatoire va être d'être trimballée dans un cirque ambulant, emmenée par un Monsieur Loyal qui a les traits de Peter Ustinov. Elle est en quelque sorte exhibée aux yeux du public, invité à lui poser des questions indiscrètes, notamment sur son passé dit scandaleux. Lola Montès est un récit en majorité en flash-back qui revient sur la jeunesse de cette dernière, en Bavière, où elle est promise à un homme bien plus âgé, mais elle n'a d'yeux que pour le jeune amant de sa mère.
Max Ophuls ne se doutait pas que ce serait son dernier film (car il préparait Montparnasse 19 avant sa disparition), mais on sent qu'il a a jeté toutes ses forces dans ce récit, assez novateur pour l'époque, de mélanger le passé et le présent, à la manière d'un Citizen Kane. Aujourd'hui, les flashbacks ne posent plus de problèmes aux spectateurs aguerris, mais ça perturbait fortement à l'époque.
Mais c'est surtout le portrait de cette femme indigne qui est sidérant, avec une magnifique Martine Carol, dont ce sera le rôle de sa vie. D'une grande fragilité, elle est comme une bougie qui s'illumine de sa plus forte flamme avant de disparaitre, et, suprême humiliation, elle ressemble à un trophée exhibé en public pour ses mauvaises manières.
La réalisation d'Ophuls est en soi sidérante, avec ses travellings circulaires à 360°, mais aussi par le choix des couleurs qui pètent à l'écran, et donnent aussi une image désuète dans les scènes de flashback, qui font penser à du Sissi. J'admets cependant que le rythme peut parfois donner l'impression d'un film alangui, mais il y a une telle force chez ce personnage que j'en fus accroché, pour le meilleur et le pire.
C'est par ce film que Max Ophuls nous fit ses adieux aux cinéma, un réalisateur qui m'a souvent intéressé et qui a signé un des plus beaux mélos avec Lettres d'une inconnue.