Il y a des carrières comme ça, ponctuées d'un coup d'éclat avant de retourner vers l’obscurité dont elles se sont extraites le temps d'un film. C'est le cas de l'australien Colin Eggleston lorsque qu'il réalise Long Weekend en 1978. Récompensé l'année suivante à Avoriaz par l'antenne d'or, exæquo avec la nouvelle version de L'Invasion des profanateurs de Phillip Kaufman, le film se bâtit une petite réputation de film culte. Pourtant, c'est un échec cuisant au pays des kangourous, privant sûrement son réalisateur d’un nouveau projet immédiat. Issu de la télévision, il y retournera dès le début des années 80 avant de retrouver le grand écran quelques années plus tard, mais sans réitérer le succès de son premier film.


Long Weekend narre les péripéties d'un couple en crise qui, sous l'impulsion du mari, part camper près d'une plage réputée déserte. Se comportant en territoire conquis, sans aucun respect envers une nature accueillante, ils subiront les foudres des hôtes de ces lieux. Chose assez rare à l'époque, hormis les films catastrophe japonais, la question de l'écologie est abordée frontalement, sans détour. Alors que nos protagonistes s'évertuent à n'en faire qu'à leur tête (installation sauvage, jets de détritus, élimination de toute forme de vie), la mise en scène s'appuie sur un cadre majestueux, composé de sable chaud, d'un bord de mer paradisiaque et de d'une flore aussi dense que mystérieuse. Eggleston appuie ainsi le contraste entre une humanité trop sûre d'elle, qui amoche la biodiversité face à une nature aux ressources abondantes. Grâce à ses personnages rendus volontairement antipathiques, il fait progressivement basculer le point de vue du spectateur, qui n'attend plus qu'une chose, le retour de bâton. Qui, en bon film cathartique, se produira lors d'un dernier tiers quasi muet, rageur et terriblement punitif.


Quel dommage alors que le tout soit handicapé par un rythme aussi pachydermique. Chaque mouvement, chaque action d'un personnage prend un temps fou à l'écran. De nombreux plans commencent trop tôt et finissent trop tard. Il n'est plus question de lenteurs mais de longueurs. A défaut de créer une ambiance, la vision du film devient par moment irritable. Exception faite des interactions animales, qui ont la bonne idée de relancer le récit, de retarder la confrontation inévitable entre l'Homme et son environnement, Eggleston ne parvient pas à créer l'atmosphère suffocante recherchée mais rend le tout plat, sans relief. Malgré une Briony Behets sur courant alternatif, le réalisateur peut s'appuyer sur une performance plutôt solide de John Hargreaves, quarantenaire en pleine crise de virilité, qui à travers ce retour supposé à l'état sauvage espère redevenir l'homme qu'il n'est plus, ou, plus justement, l'homme qu'il ne croit plus être. Alors que la vie sexuelle du couple est au point mort, il tire sur tout ce qui bouge avec son nouveau fusil (métaphore subtile), coupe du bois, nage dans l'océan et harponne des poissons. S’engueulant de prime régulièrement avec sa femme, il était en effet temps que la nature reprenne ses droits.

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le 28 déc. 2023

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