Ryan Gosling, je l'aime bien. Il a une bonne bouille, il joue comme un Dieu, et en plus il chante bien (cf. La La Land). Nicolas Winding Refn aussi, je l'aime bien. Grand ami de Jodorowsky, réalisateur de talent, auteur d'un de mes films préférés, The Neon Demon, il est également celui qui est à l'origine de Drive, l'un des film les plus forts et importants - à mes yeux - de ces dernières années. Donc lorsqu'on me dit que c'est lui qui a donné envie à Gosling de se mettre derrière une caméra pour faire son propre film qu'il a lui-même écrit et dans lequel il ne joue pas, je n'ai qu'une chose à dire : envoyez les popcorns, c'est ti-par.
Cela fait un certain temps que j'ai vu Lost River, la première réalisation de Ryan Gosling donc. Et si je me décide à écrire un truc à son sujet après tout ce temps, c'est pour la simple et bonne raison que je viens de voir Drive, de NWR. Et au-delà de la qualité flagrante du film, quelque chose d'autre m'a frappé, et m'a ramené à une soirée d'avril durant laquelle je n'avais rien de mieux à faire que de mater des films. Pour être plus précis, cela m'a fait poser une question : pourquoi est-ce que Drive, ou The Neon Demon, fonctionne, tandis que Lost River se révèle être sympa sans vraiment être mémorable ?
Car Lost River est esthétiquement réussi. La lumière, la réa et la mise en scène donnent un rendu magnifique, les acteurs sont plutôt bons, et les musiques sont cools - même si je trouve que c'est Johnny Jewel qui veut faire son Cliff Martinez. À regarder c'est un plaisir véritable, car la rétine est caressée de bout en bout et même les scènes "gores" sont assez esthétisées pour ne pas paraître insoutenables. Mais le truc, c'est que dans la forme, ça a tout d'un NWR contrefait. Il n'y a aucune empreinte, aucune patte assez forte pour que l'on s'en rappelle. Gosling ne développe aucun univers visuel ou artistique qui lui est propre et autour duquel il peut articuler tous ses effets de mise en scène et ses jeux de lumière. De par sa volonté de faire du Nicolas Winding Refn, et de par cette proximité bien trop appuyée avec le réalisateur en question, le film ne parvient à se trouver une identité visuelle.
Dans sa démarche, on est en plein dans un film fonctionnant par symboles, le principal soucis étant alors qu'aucun de ces symboles ne fonctionne. Et ce pour une raison toute bête : il y a un manque flagrant de subtilité dans ce que le film nous montre. Cela fonctionne à certains instants, mais lorsque l'on comprend où est-ce que le film veut nous emmener, c'est mort. Et c'est ça qui fait de Lost River une très jolie coquille pour un ensemble assez creux. Je ne renie pas le moment que j'ai passé devant, en plus de quoi je ne renie pas le fait que c'est un film très personnel pour Gosling. Peut être que ce manque d'identité que je lui reproche n'est que la preuve de l'existence d'une identité au film, et que je n'ai pas réussi à la cerner ; peut être que lorsque je lui reproche d'être creux c'est juste que je n'ai pas compris là où voulait m'emmener le film et qu'il est bien plus complexe que je ne le pense. Il demeure que, si j'ai passé un bon moment, aujourd'hui je ne me rappelle de Lost River que pour quelques bribes, mais aussi comme les premiers pas d'un réalisateur qui se cherche et qui n'exploite pas tout son potentiel. Et en ce qu'il s'agit de la suite, je l'attends impatiemment car je pense que Gosling peut facilement se démarquer.