Comme un poème, en deux temps.
Le premier, à travers une longue introduction sous la forme d'un témoignage. Une rescapée d'Hiroshima raconte son histoire : elle avait 14 ans lorsque la bombe a explosé près de chez elle, et sa sœur ainée, infirmière, s'était occupée des blessés dans l'immédiat. Pendant de longues minutes, elle décrit la vie avant l'explosion nucléaire, puis le basculement dans l'horreur. Les cadavres qui affluent, informes, la ville qui disparaît, en poussière. Vient ensuite le temps de "la maladie de la bombe", à mesure qu'apparaissent les symptômes d'une contamination radioactive. Ces effets à retardement qui ont emporté sa sœur, dans les jours qui suivirent son retour chez elle. À ce moment-là, on a perdu pied avec la fiction, la réalité documentaire semble avoir pris le dessus, on oublie qu'il s'agit d'une actrice récitant son texte.
Le second, sous la forme d'une longue déambulation dans les abords d'Hiroshima aujourd’hui. La fiction semble avoir repris ses droits. Le réalisateur d'un film documentaire, dans lequel figurera le témoignage de la première partie, rencontre par hasard Michiko, une jeune femme étrange. Insouciante, souriante, et mystérieuse dans sa connaissance des faits historiques comme dans ses vêtements traditionnels, en dépit de sa jeunesse. Une balade très volontairement poétique, épurée, à l'onirisme affleurant.
Le film souffre d'une certaine naïveté, d'une approche très superficielle, d'une douceur exacerbée, à la limite de la mièvrerie. Cette démarche extrêmement simpliste s'illustre particulièrement dans la rencontre entre le couple et l'enfant accompagné de son grand-père, au bord de l'eau, qui clôturera le film. Il y a des schémas, notamment familiaux, avec des cases vides comblées par des gens de passage (le caractère de parents de substitution du duo tout juste formé est légèrement attendu), un peu éculés. Il y a des révélations un peu abruptes. Mais si on le prend comme un croquis, comme une ébauche de poème, sa tendresse parvient à se frayer un chemin à travers la dureté du fond (et la maladresse de la forme) que l'on finit presque par oublier. L'anecdotique prédomine, mais la sérénité qui se dégage de cette présence fantomatique apaise et panse quelques plaies, d'hier ou d'aujourd'hui, dans les chairs ou dans les esprits. C'est indéniable.