Crée par le mangaka Monkey Punch en 1967 (et enfin adapté - en partie- en 2021 !), Lupin III est un voleur et une maligne fripouille, un beau portrait que les nombreuses adaptations compléteront avec un petit coeur sous sa veste. En France, il se fera longtemps appeler Edgar la cambriole, un pseudonyme qui a son charme, mais l'énergumène n'y a pas la même renommée qu’au Japon, avec de nombreuses et régulières adaptations. En 1979 Hayao Miyazaki fera ses grands débuts de réalisateur de films d’animation avec le personnage dans Le Château de Cagliostro.
Le filou cambrioleur est ainsi régulièrement à l’honneur, mais il est plus rare de le voir arriver jusque dans nos salles obscures. Contrairement à d’autres films animés japonais attendus et déclinés de grandes licences, tels que Dragon Quest: Your Story (du même réalisateur) ou Ni No Kuni qui eux ont été distribués sur Netflix. C’est Eurozoom, déjà à l’œuvre sur la majorité des sorties en salles des films d’animation japonais, qui s’en est occupé, ce qui au gré de la situation sanitaire est courageux, mais à saluer. Le film récolte un bon succès critique, salué sur Libération, Le Figaro ou ici même.
Le film est écrit et réalisé par Takashi Yamazaki, un habitué des films à grand spectacle, spécialiste des effets spéciaux, beaucoup de ses productions ont été diffusées en France dont le matrixien mais sympathique Returner. Le film adopte pour la première fois une animation en CGI, les visuels sont réussis, mais il faut passer outre un rendu de la peau un peu curieux, mais le tout sans rien sacrifier au spectacle.
Il n’y a d’ailleurs pas besoin d’avoir son Brevet du Lupin pour se raccrocher à l’univers, le film ne présente rien mais la simplicité des personnages fait qu’il n’est pas difficile de suivre. Lupin III est ce voleur facétieux, jamais sérieux, mais fin observateur et qui a souvent un coup d’avance, et s’il n’en a pas il arrive toujours à se sortir des pires situations.. Un grand dadais qui gesticule et se faufile, d’une grande agilité qui lui permet de toujours atterrir sur ses pattes. Différents personnages gravitent autour de lui, tels que le sombre Daisuke, as de la gâchette, le réservé Goemon, samurai qui tranche tout, la belle Fujiko, amie ou ennemie selon les situations, pourchassés par Koichi Zenigata, inspecteur d’Interpol, pour qui la capture du vil Lupin est la plus grande des obsessions. Pour les personnages secondaires, c’est tout ce qu’il y a savoir, et c’est tout ce qui est présenté, et pourtant c’est bien suffisant, chacun de leurs dialogues ou de leurs actions appuient leur personnalité et un charisme certain.
Pour Lupin III, c’est un peu différent, puisque l’histoire se raccorde à celle de son aïeul, même si ce n’est qu’en pointillés. Une nouvelle alliée est introduite, Laetitia, à la recherche d’un artefact archéologique menant à une source d’énergie antique, en lien avec son grand-père. La jeune et douce fille est manipulée par des nazis à la recherche de cette énergie. La candeur de l’apprentie archéologique est un peu trop appuyée, de même que ces antagonistes adorateurs du Führer ont un peu trop de temps d’exposition alors qu’ils n’ont rien de plus à offrir. Mais ce nouveau cadre et ces nouveaux personnages constituent le maillon central d’une histoire assez classique, parfois banale, mais bien enrobée.
Le film commence alors dans un charmant Paris des années 1960 ou proches, le tout sans avoir la main trop lourde sur les clichés, pour partir vers d’autres régions, mais aussi dans les airs. Le tout se fait sans véritablement s’arrêter, malgré une petite baisse de régime au milieu, peu importe la cohérence. Le tout est tellement mise en scène et exagéré qu’il est inutile de chercher les petites bêtes, le film se veut décontracté.
Il assure d’ailleurs le spectacle, renouvelant toujours ses scènes. Lupin fait ses cabrioles, avec son insouciance habituelle, glissant entre les meutes de policiers, plongeant dans les airs les mains dans les poches. D’autres séquences proposent des concentrés en action, rythmés et inventifs, à l’image de cette impressionnante course poursuite qui réunit Lupin et ses acolytes Daisuke et Goemon. La 3D virevolte, tout semble possible. Le film a du peps, c’est certain, mais dès que la dose ralentit on ne voit que trop bien certaines légèretés du scénario ainsi que ses antagonistes nazis qui n’ont pas le même charisme que Lupin et ses amis.
Mais c’est peut-être aussi pour ça que le métrage plaît autant, tout s’efface devant son visionnage, son aventure décontractée nous fait oublier d’autres problèmes, son énergie nous emporte, ses personnages hauts en couleur sont là pour nous, pour nous divertir et nous amuser. Au son de la bande-son jazzy, signée par le vétéran Yuji Ohno, énergique et swingée, Lupin III: The First nous fait danser, tant pis pour ses faiblesses.