Mad God est un film muet, fragmenté, fleuve, bâti comme un récit d'exploration aventureuse flirtant régulièrement avec différents sous genres de l'horreur. C'est aussi un film sans protagoniste central, sans attache émotionnelle directe car la plupart de nos personnages seront muets, mutiques ou difformes. C'est en fait un film qui n'a rien d'autre à proposer que son univers. Un énorme univers, compilant divers facettes atroces de l'histoire humaine en les fusionnant avec du steam punk gore, du gothique flamboyant, du post apo sec... La générosité de ce film est sans limite, et en plus de ce voyage dans un inconnu flirtant régulièrement avec l'enfer (où certains sont les dieux des autres), la mise en scène s'attarde régulièrement sur la portée symbolique de ses visions. La faible valeur de la Vie, l'indifférence générale à la douleur d'autrui, le pouvoir d'infliger le mal par simple volonté ou désir... Le film se plaît à explorer les divers facettes de ce qui fait la divinité selon l'homme, la domination du puissant sur le soumis. La banalisation d'une situation asymétrique et constamment injuste contre laquelle rien n'est possible, appuyée par une bande son tournée vers le post rock et les mélodies planantes, typiques du genre post apocalyptique, dans un univers où tout est brisé et d'où rien d'autre que le chaos n'émerge.
Inattendu, fascinant, sans limite, ce film quasi expérimental proposant sans cesse de nouvelles visions possède également tous les défauts de ses qualités. Pas de personnage central : pas de conclusion satisfaisante. Des visions dantesques d'un enfer mécanique ? Nous avons le sentiment de trop vite quitter les différentes ambiances qui semblent sous exploitées. Un rytme planant et contemplatif ? Mou et mal équilibré pour certains spectateurs. Mad God ne cherche pas à plaire, il se livre tout entier et sans défenses. Ne serait-ce que pour ses qualités visuelles, ce projet singulier saura trouver un public amateur d'OFNI en quête de véritables visions infernales. Décidément, 2022 commence fort !