On a pleuré comme un veau, voilà c'est dit. Madame Sylvie Hofmann est chef de service dans le département des soins palliatifs (et phases terminales) dans l'Hôpital public du Nord de Marseille, et doit prendre sa retraite dans l'année. Mais comment quitter son équipe de jeunes infirmiers qui l'adorent, comment se mettre au vert du jour au lendemain quand chaque jour est l'accompagnement d'un patient dans sa fin de vie (une tâche difficile), avec le soutien de sa famille dans cette atroce épreuve, à chaque fois une expérience déchirante pour celle qui ne doit rien laisser transparaître (quand elle se laisse aller émotionnellement dans l'histoire de la petite fille qu'elle a accompagnée dans la mort, qui ressemblait à sa propre fille, on ne peut faire autrement que de sortir le Kleenex pour éponger le litre de larmes qui ruisselle sur nos joues). Au fur et à mesure que l'on découvre le quotidien difficile de la Dame, on éprouve de plus en plus de respect pour son métier de l'impossible (elle est l'une des rares à l'avoir exercé de bout en bout pendant quarante ans, quand la moyenne est d'une année aujourd'hui...), on écoute ses récits de patientèle avec le plus grand silence, on chouine quand elle devient faillible (on voudrait qu'elle soit un robot, mais face à la détresse humaine, face à la Mort au quotidien, on ne sait pas qui pourrait rester impassible), on rit de bon cœur avec les phrases hilarantes de sa maman (qui va bien, on a demandé !), dans son bizutage de fin de carrière (la bulle d'air du documentaire, qui fait vraiment du bien), et on aime accompagner cette Dame jusque dans son intimité (on découvre son mari, et le rapport qu'il a avec ce métier particulier et la retraite). On a eu la chance d'avoir Madame Sylvie Hofmann dans la salle, et la fin de séance s'est conclue par une interminable salve d'applaudissements, faisant (encore) pleurer la Dame (et l'ensemble de la salle), comme un remerciement chaleureux pour ces quarante années extraordinaires à accompagner les mourants et leurs familles, partageable à toutes celles qui exercent aujourd'hui ce terrible (mais magnifique) métier. Même si elle s'en défend, on pense à tous ceux qui ont mieux vécu leurs derniers instants de vie grâce à elle, et on l'affirme : tous les héros n'ont pas de cape, mais une blouse blanche (tachée de Betadine).