On retrouve dans Mademoiselle les qualités certaines du cinéma de Park Chan-wook, à savoir la mise en scène soignée et un sens de l'esthétisme bien réel, cette fois heureusement débarrassé du carcan morbide de la "trilogie de la vengeance". Park a simplifié sa réalisation, c'est évident et ça s'en ressent dès les premières minutes.


Ce qui n'empêche pas une surcharge dans les décors qui, quoique crédibles, font vraiment trop décors de cinéma justement. Mais pour le reste c'est très beau, et la photographie rattrape largement les problèmes de caméra, notamment un effet fisheye beaucoup trop prononcé sur plusieurs plans resserrés, et un flou sur les contours de l'image inhérent au mauvais calibrage d'une focale courte. Je chipote, mais pour un film dont on loue l'esthétisme à outrance, c'est toujours bon à signaler.


L'histoire est plutôt bien ficelée, et c'est normal que Park fasse un bon travail dans la narration (hormis quelques moments de flottement, notamment dans les flashbacks) vu que le scénario est adapté d'un roman dont il a simplement déplacé l'action de l'Angleterre victorienne vers la Corée des années 20. La romance entre les deux femmes en revanche m'a laissé plus perplexe. Crédible d'une part, et hautement désagréable de l'autre lors de scènes de porno lesbien où l'hypersexualisation et l'anachronisme règnent en maître, mais qui se laissent évidemment regarder sans trop broncher.


Aucune réflexion cependant sur l'homosexualité, le plaisir, le regard de l'homme sur la femme, ou même le rôle de toute cette littérature érotique dont la place reste assez ambigüe dans l'oeuvre... Park le philosophe était manifestement plus occupé à filmer fessiers et tétons (du reste fort agréables) de son duo d'actrices (que j'ai trouvé correctes, sans plus).


Passé le plaisir coupable du visionnage, je me suis quand même demandé, comme après chaque film de Park, si on n'aurait pas pu mieux faire de ces 2h 15 ; toujours avec cette impression un peu étrange d'avoir eu affaire à un sacré bonimenteur - de talent, certes, mais escroc quand même. Mais bon, pour celui-là au moins, je veux bien lui laisser le bénéfice du doute.

grantofficer
5
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes Les meilleurs films de Park Chan-wook, Les meilleurs films coréens et Les meilleurs films LGBTI+

Créée

le 6 juil. 2022

Critique lue 188 fois

2 j'aime

3 commentaires

grantofficer

Écrit par

Critique lue 188 fois

2
3

D'autres avis sur Mademoiselle

Mademoiselle
Velvetman
7

Lecture sadienne et boules de geisha

Sous couvert d’un jeu de duperie où l’arnaque change constamment de propriétaire (la servante, l’héritière, le prétendant), la nouvelle œuvre de Park Chan Wook se mue en un objet filmique difficile à...

le 5 nov. 2016

133 j'aime

9

Mademoiselle
Kiwi-
9

Édulcorée(s).

Déjà reconnu pour ses incursions dans le domaine du thriller machiavélique diaboliquement érotique, Park Chan-Wook s'aventure avec « Mademoiselle » dans un film de manipulation opulent se déroulant...

le 23 mai 2016

110 j'aime

8

Mademoiselle
Behind_the_Mask
10

Une fessée s'il vous plaît

Sa beauté irradie, son charme fascine. Sa voix posée et monocorde, lors de ses lectures troublantes, ensorcelle. J'ai posé les yeux sur Mademoiselle pour immédiatement en tomber amoureux. Elle est...

le 7 déc. 2016

66 j'aime

20

Du même critique

Stranger
grantofficer
9

L'arbre qui cache la forêt (critique saisons 1 & 2)

Critique de la saison 1 Stranger, de son nom original coréen Secret Forest, nous plonge dans une affaire criminelle atypique dont a la charge un procureur génial qui, à la suite d'une opération du...

le 16 mars 2020

23 j'aime

11

My Mister
grantofficer
9

Un homme d'exception

Je ne vais pas y aller par quatre chemins : My Mister est l'une des plus belles séries que j'ai pu voir récemment. L'histoire de la série tourne autour des deux personnages de Park Dong-Hun,...

le 29 mai 2020

22 j'aime

15

My Name
grantofficer
6

The Girl From Nowhere

Un an après le très surprenant Extracurricular, Kim Jin-min rempile avec un nouveau drama produit par et pour Netflix. Cette fois le bonhomme s’inspire de l’univers des gangs et des stups pour...

le 16 oct. 2021

21 j'aime

1