Y'a des films comme des vins qui sont bons (ou pas) jeunes et d'autres vieux.
Ici, on est face à un film toujours bon ;-), ou plutôt toujours totalement d'actualité dans sa problématique, même s'il est en N&B ou sous-titré ou "vieux" ou autre grief qui n'a lieu d'être.
A l'époque de la fin du "Miracle italien", dynamité caustiquement par la comédie dite italienne, à découvrir ou redécouvrir pour sa profondeur derrière les ricanements (mais c'est un autre débat, je m'emporte), ce film est essentiel.
Essentiel, car sobre sans être clinique, Rosi est maître du truc, on suit pas à pas les protagonistes, avec la possibilité d'en voir beaucoup et imaginer une partie du reste.
Ici, pas de mitraillage dans les rues ou d'arrestation spectaculaire, mais une suite de scènes de foule (rue, conseil municipal) ou plus intimes, parfaitement huilées.
Les comédiens, initialement, sont tous excellents. De la star Rod Steiger en Nanar Tapie napolitain ou vieux routiers du cinéma transalpin à l'instar de Salvo Randone et Guido Alberti en politicards véreux et, brillance du casting Carlo Fermariello (vrai homme politique) en conseiller municipal (avec la voix d'Henry Djanik, qui lui va si bien, même la VF est top) vertueux face à la magouille structurelle.
On observe tout ce beau monde s'agiter ou conspirer, bien loin des besoins et envies des habitants de cet hypercentre historique (la ville poreuse, comme on dit) que la gentrification (déjà à l'époque) va expulser sans vergogna.
Donc à voir et à revoir pour savourer œuvre et mécanismes dénoncés...en vain. Le maire sortant nous donne même une belle leçon de démocratie, biffetons en main.
Rien n'a véritablement changé ou évolué depuis 60 ans. Si ce n'est que les De Vita sont, à ce jour, personnages de science-fiction.
Film majeur du cinéma italien, à (re)découvrir d'urgence et à compléter par l'exceptionnel documentaire belge "La bataille des Marolles" qui raconte la même histoire et dont le De Vita local (un truculent cureton à la Don Camillo) cite le film.
La boucle est bouclée et les affaires continuent.