En 1973, c'est la crise pétrolière, Giscard n'est même pas encore là pour nous sauver, la France, trente ans après la seconde guerre mondiale, le courageux Robert Lamoureux exhume notre passé de looser et nous raconte la débâcle, ce grand bordel de 1940 ; la défaite et la fuite du front, et l'exode qui s'annonce sur les routes de France. Au milieu de ce bordel historique, Mais où est donc la septième compagnie, c'est le destin de trois courageux hommes : le sergent chef Chaudard - Pierre Mondy, au sommet de sa médiocre carrière -, les soldats Pithiviers - Jean Lefebvre, merveilleux comme toujours, chuitant, larmoyant, tête à claque - et Tasin - Aldo, la classe, forcément, toujours ! -, et de la France, en cette période de trouble : casting de malade pour une leçon d'indignation bien avant l'heure.

On va suivre, comme ça, pendant une petite et réglementaire heure et demi, nos trois lascars : comme dans les grands films de guerre, il n'y a besoin d'en faire des tonnes dans les scènes de combat pour toucher au plus profond de l'âme humaine, Mais où est donc la septième compagnie, plus qu'un film de guerre est un film de camaraderie, d'amitié dans la galère ; un film lent sur les difficultés du quotidien : quelle scène plus belle que celle du bain ? Ce petit bain - POUR LE CHEF ! - dans la rivière au clair des lunes, ce délassement, ce repos mérité d'une armée qu'on a tant raillé ; ces scènes de camping dans la forêt, feu de bois et gibier, le clin d'oeil au braconnier de nos campagnes ; film politique, c'est inévitable, comme dans La grande illusion, sous le combat de ces trois soldats français, une lutte de classe ne cesse de se tendre ; mais la lutte des classes, heureusement, un verre de rouge, un saucisson, elle s'assouplit ; dans la difficulté, il n'est jamais vain de rappeler que l'humanité se cache sous les uniformes et leurs galons.

Et puis, le jour se lève, et le courage revient ; il est temps pour nos égarés de retrouver la septième compagnie, tombée aux mains du futur occupant - mais déjà efficace - les nazis remontent une colonne de prisonniers, le destin de la France s'en va pour les camps allemands ; faut-il cesser la lutte ? S'enfuir et battre la campagne ? Non ; la France est debout, la France est grande, et la France - Aldo Maccione, Jean Lefebvre, Pierre Mondy ! Elle est belle, non ? - a peut-être perdu une bataille mais elle n'a pas encore perdu la guerre ! Clin d'oeil aux collabos de la première heure, dans une scène d'infiltration, subtile, à l'image du film tout entier ; Jean Lefebvre, casque de travers, l'accent bosch au couteau, FOUS AFEZ DU A L'AIL ? Que dire de plus, dans un moment pareil.

Avant de faire des films aussi nuls que ceux de maintenant, la France avait déjà la chance de faire des films nuls ; c'est un peu une tradition, chez nous, la nullité, les gens aiment bien, ça leur évite d'entendre parler de politique, de crise, de saloperies comme ça, ça les détend après le travail. Je pourrais cracher un moment sur tout ça, mais non, je suis d'assez bonne humeur aujourd'hui, j'avais envie d'être gentil. Et quoi de mieux que d'être gentil dans la vie ? Cette année là le film ratera, hélas, la Palme d'or, raflée, de peu, par Conversation secrète, le film du vieux Coppola, autre vision du monde, elle aussi dans l'air du temps.

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le 28 mars 2013

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le 28 mars 2013

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J. Z. D.

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