Mala noche pour l'histoire, hermosa noche pour le Cinéma

Et Gus Van Sant fut ! C’est donc en 1986 qu’il nous livre son premier long-métrage déjà porteur de bien des symptômes du cinéma indépendant américain dont il va très vite devenir The Maître. Un premier film brut, sans aucun moyen financier, tourné dans l’urgence en noir et blanc et en 16 mm. Des défauts, ce film en a. Mala Noche fait donc, pour moi, office de premier essai, de brouillon avant le chef-d’œuvre. Tout est déjà là, prêt à l’emploi, les travellings, les plans sur les nuages qui ornent le ciel, le script minimal, la mise en scène très classe, les thèmes abordés et cette liberté de ton. Peut-être d’ailleurs qu’elle n’a jamais été aussi forte qu’ici. Mala Noche est un grand film de liberté qui respire les années 1980 et insuffle un vent de fraîcheur à son ensemble. Tourné dans la hâte, figeant sur ses images cette beauté éphémère capturée par ces rayons de lumière qui pénètrent les bâtiments et ratissent les routes de l’Oregon, le film comporte quelques très belles scènes qui restent dans la tête. Pourtant, au final, on arrive pas à être pleinement satisfait par ce qu’on vient de voir. La faute, certainement, à une fin que j’ai trouvé un peu brouillonne, bâclée peut-être comme coupant le film dans son élan. La faute aussi, à son caractère sec, très frontal qui n’y va pas par 4 chemins pour dire ce qu’il a dire. Les personnages sont ainsi souvent très crus dans les dialogues, ce qui fut un « choc » en ce qui me concerne, loin de la poésie et du style tout en douceur de ce que je connaissais alors de Gus Van Sant. C’est aussi un film plus nerveux dans sa composition qui ne manifeste aucun effet de lenteur, de dilatation du temps. A vrai dire, je m’attendais à beaucoup aimer ce film. Et je dois donc dire que c’est une semi-déception. Car malgré ses promesses, j’ai finalement eu du mal à m’attacher aux personnages. J’aime l’esprit du film, ce qu’il dégage, le portrait qu’il brosse de cette Amérique marginale, mais paradoxalement, j’ai du mal avec ses protagonistes. C’est peut-être trop extrême pour moi, je ne sais pas, il reste là un bon film en tout cas, que j’aimerai aimer davantage mais qui pourtant me laisse un peu froid. A revoir peut-être. Et sinon, au plaisir de voir ce que ces 76 minutes ont laissé germer derrière elles. Le génie était né… Né pour suivre cette route. Cette route qui n’a pas de fin…
Vino
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le 2 mai 2014

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