Lee est un homme plutôt austère, qui ne s’embarrasse pas de politesse envers les gens, envers qui il fuit absolument le contact. Il vit dans un studio à une pièce, boit et cherche la bagarre dans les bars. Pourtant, quand son frère meurt d’une atteinte cardiaque, il a la surprise d’apprendre qu’il est désigné tuteur de son neveu, ce dont il refuse catégoriquement. Reste à trouver une solution, trouver d’autres personnes aptes à s’occuper de Patrick, jeune adolescent qui profite de la vie, entre hockey, les amis et les copines. Entre les deux hommes, l’entente n’est pas toujours facile, ils ne sont tous deux pas à l’aise pour exprimer leurs émotions. D’autant qu’une terrible tragédie explique le comportement de Lee, et qu’il n’est pas encore prêt à surmonter ce traumatisme.
« Manchester by the sea » n’est pas un film traditionnel. Dans un film traditionnel, les scènes tristes ou dramatiques auraient été appuyées, les deux hommes seraient parvenus à s’entendre, à régler leurs problèmes et à se mettre d’accord pour vivre ensemble à la fin. Ce n’est pas totalement la façon dont se déroule l’histoire. Les moments dramatiques sont espacés de moments plus légers, parfois drôles, souvent banales, de la vie de tous les jours. Les deux hommes se cherchent, s’engueulent, se réconfortent. Pendant un temps, Lee accepte de laisser une place pour son neveu, mais sans se décider à quitter Boston pour revivre à Manchester, lieu chargé de passé.
Un film plus réaliste, plus proche de la vraie vie, en somme, avec des êtres qui se cherchent, continuent de se chercher, nouent et dénouent des liens, ne parviennent pas à exprimer des sentiments trop forts pour eux, passent à côté d’opportunités qui leur permettraient d’aller mieux.
Un passé qui s’immisce au sein du présent au gré de nombreux flash-back, les deux se mélangeant parfois de manière trompeuse, tant ils s’enchaînent sans préavis. Façon de montrer, sans doute, que le passé continue d’orienter nos pas dans le présent, peu importe nos efforts pour l’oublier. Ce qui permet de mieux comprendre l’histoire des personnages, leurs relations, et surtout le terrible drame qu’à vécu le personnage principal.
Des longueurs, incontournablement, sans que le film ne provoque l’ennui. On salue l’originalité de ne pas recourir au pathos, mais peut-être cet aspect aurait toutefois gagné à être plus appuyé pour que le film soit plus marquant.
Il n’est pas facile de s’attacher au protagoniste. Déjà, son attitude indifférente et repoussante n’aide pas à l’apprécier, mais même lorsque l’on apprend son histoire, l’ampleur de son traumatisme rend difficile de comprendre ce qu’il a enduré. Il n’est dès lors pas évident d’adhérer à lui. On finit pourtant par s’attacher, avec le temps, à cet homme qui se cherche et qui n’arrive pas à aller de l’avant. On a envie de le pousser, de lui dire qu’il est enfin temps de cesser de se détruire et de se couper de tous contacts, mais en vain. Il faudra encore plus de temps, peut-être, pour qu’il règle ses problèmes, après la fin du film.
« Manchester by the sea » n’est peut-être pas particulièrement intense, il ne l’est pas autant que l’on aurait pu s’imaginer étant donné le sujet, mais il est marque malgré tout, par son déroulement original, et par l’impression que quelque part, l’histoire continue encore.