Il y a une question que je me suis posé deux fois dans ma vie, et j'espère que ce ne sera jamais trois... Quel est le 1er film que je vais aller voir à la réouverture des salles ?
Au mois de juin dernier, j'avais opté pour Benni. Sans vouloir me lancer des fleurs, c'était une excellente idée. Ce film allemand était l'une des plus belles pépites de 2020, en plus d'avoir révélé Helena Zengel, une jeune actrice bouleversante qui aura certainement une renommée mondiale dans quelques années.
Cette question du fameux 1er film à aller voir, j'ai donc récemment dû me la reposer. Parmi un line-up très fourni, j'ai finalement choisi Mandibules. Nouvelle bonne idée ! Bien que ce ne soit pas le chef-d'œuvre de Quentin Dupieux, c'est un film idéal pour retrouver les salles de cinéma.
Aller en salle, c'est notamment sortir de son quotidien le temps d'un film. Avec Mandibules, c'est particulièrement le cas. Quentin Dupieux propose, une nouvelle fois, un univers totalement lunaire et réjouissant. Les personnages ont des réactions anormales, des comportements étranges, ou même des tares improbables. L'ambiance visuelle du film parvient d'ailleurs à accentuer toutes ces bizarreries. Les couleurs désaturées détachent cet univers du réel, et lui donne des airs de mirage.
Evidemment, tout cela est très classique dans le cinéma de Quentin Dupieux... Mais pourquoi changer un cocktail qui fonctionne ?
Encore une fois, le réalisateur nous offre un film absurde à l'humour efficace. Adèle Exarchopoulos parvient à faire rire tout en exaspérant. David Marsais et Grégoire Ludig prouvent à nouveau que leur duo fonctionne. C'est peut-être d'ailleurs l'une des limites du film... Il aurait gagné à faire interagir plus rapidement ces deux génies du Palmashow avec le reste du casting. La première partie de Mandibules se repose trop sur la patte comique du duo. Ca fonctionne dans un premier temps, mais ça s'essouffle légèrement sur la longueur. Heureusement, lorsqu'il se transforme en film de bande, Mandibules gagne en rythme et en férocité.
Cependant, on peut regretter le manque d'une certaine noirceur, qui fait aussi le charme des films de Quentin Dupieux. Le réalisateur fait le choix d'un "long"-métrage globalement très léger (à un meurtre près). C'est agréable et efficace, mais ça en fera sûrement une œuvre moins marquante qu'un Réalité notamment. Dans ce nouveau cru, le côté absurde fait beaucoup rire, mais il dérange peu, et n'explose pas les cerveaux des spectateurs.
Mais en sortant de la salle, j'étais heureux. Heureux d'être retourné au ciné, mais aussi d'avoir vu un film qui avait sa singularité, et qui n'était rien de moins qu'un délire très drôle et satisfaisant.