Très grand film. Mandingo emmène le spectateur dans tellement de directions qu'il est impossible de le résumer. En introduction du Bluray, Jean-Baptiste Thoret parle bien sûr d'un anti "Autant emporte le vent" et nous rappelle que le personnage plus ou moins central incarné par Perry King jouera quelques années plus tard le professeur de lycée décimant une bande de mauvais élèves punks dans "Classe 84". Mandingo est un film qui laisse perplexe, mais une perplexité quasi métaphysique. Quel est le sens de ce film, et en a-t-il seulement un ? Il s'agit plutôt de la peinture d'une époque, la première moitié du 19ème siècle, dans une Louisiane esclavagiste. Bien sûr, on n'y trouve nulle trace d'apologie de la traite des Noirs mais le film n'est pas non plus une dénonciation convenue de l'esclavage. Avec son côté outrageant, violent, parfois même grotesque, le film présente une vision exacerbée, où les prémices d'une rédemption et d'un apaisement sont immédiatement anéanties.
Ainsi, Hammond Maxwell, joué par Perry King, apparait au début comme le Blanc dont le racisme n'est pas viscéral mais plutôt le fait de son époque. Fils d'un propriétaire terrien, à la beauté physique certaine, il est en même temps handicapé par une jambe raide. Il boîte comme s'il avançait péniblement en équilibre entre deux mondes. Un pied dans l'ancien, esclavagiste et sanglant, et un pied dans celui de demain, probablement meilleur, mais qu'il reste à construire. Cette dualité, pour ne pas dire fracture, imprègne tout le film. Hammond Maxwell aime une esclave mais, en dépit de ses sentiments, la jeune femme reste cantonnée à son statut. Et la bienveillance dont il peut faire preuve n'est qu'une flammèche en regard de son goût incandescent pour les combats d'esclaves. Autre curiosité du film, il est ponctué de scènes légèrement érotiques, parfois un peu incongrues. Jean-Baptiste Thoret nous apprend qu'il s'agit de la volonté du producteur, Dino De Laurentiis, de ratisser large. On se demande d'ailleurs comment Mandingo a pu trouver un public. A la même époque, en France, on regardait "La petite maison dans la prairie" et on en vient aujourd'hui à se dire que la vie des Ingalls aurait été plus croustillante s'ils avaient choisi de s'installer 30 ans plus tôt en Louisiane.