Après un navrant "2e sous-sol", le réalisateur s'est incroyablement bien ressaisi, livrant avec "Maniac" sans doute l'un des films d'horreur les plus déroutants et originaux depuis très longtemps. La touche du scénariste, l'excellent Alexandre Aja, et la musique de son aussi talentueux compère (Grégory Levasseur) intriguent, dérangent, peaufinent cette mise en scène subversive, qui nous contraint à nous mettre dans la peau d'un psychopathe. A ce titre il faut souligner le travail filmique qui contribue à l'illusion de réalité: caméra subjective, les différents miroirs qui laissent apparaître un Elijah Wood époustouflant et torturé, les bruitages qui se résument aux suffocations du personnage mais aussi aux dialogues qu'il noue avec ses interlocutrices... Bref une intrigue extrêmement soignée et qui prouve une fois de plus que le cinéma d'horreur ne se résume pas, contrairement à ce que répandent béatement ses détracteurs, à du trash et à du gore à gogo sans prétention. L'oeuvre transgresse les codes habituels, redéfinit notre rôle de spectateur et brise le manichéisme facile des films classiques en se glissant, en s'immergeant dans la tête de cet anti-héros, qu'on ne parvient même pas à détester, qu'on plaint même à certains moments; et c'est pour cela que le film dérange, qu'il gêne, et qu'on peut le qualifier de terrifiant. L'utilisation du mannequin, objet fétiche d'Aja (La colline, Mirrors) est la pièce essentielle du puzzle, et la fin poétique du film, tout comme la troublante humanisation de ces mannequins offrent, bien au-delà d'un profil psychologique, une réflexion philosophique intense.