Mank a gagné?
Le mérite du film, c'est de nous dire que Citizen Kane (1941) a été écrit en majeure partie par Herman Mankiewicz et non pas par Orson Welles. Ils reçurent ensemble l'Oscar du meilleur scénario...
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le 5 déc. 2020
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On pourra longtemps s'irriter de découvrir ce film de cinéma et sur le cinéma, et sa forme aussi unique, sur nos petits écrans, mais on célèbrera pourtant Netflix d'avoir une fois de plus laissé à un artiste la possibilité de réaliser un rêve, et une œuvre pour le moins difficile d'accès.
Dans sa première partie, Mank cabotine, tourne en rond, s'éternise en balancements entre "présent" diégétique et flashbacks, Fincher ne semblant pas vraiment où aller, se cherchant un sujet. Le film n'attrape donc pas son spectateur qui pourra aisément, et à raison, ne pas le trouver intéressant. Il n'y verra qu'un fantasme de réalisateur pur, un fascinant mais pas très pertinent objet de cinéaste et surtout de cinéphile, fétichiste et passéiste (de la pellicule à changer toutes les 10 minutes au noir et blanc granuleux en passant par le son volontairement abîmé), plus un défi personnel qu'un véritable apport au cinéma, qui le laissera souvent de côté. Ne film ne lui fait que trop peu de place - cette démarche prouvant certainement la patte des grands metteurs en scène -, ne le laissant se sentir convoqué que par l'humour de son attachant personnage principal, ou par ce qu'il nous apprendra de la conception du chef d'œuvre Citizen Kane (le fameux sentiment meta, du film dans le film, qui en fascinera plus d'un, et donnera un instant la sensation "d'y avoir été").
Puis, et sans surprise lorsque l'on connaît Fincher, Mank devient petit à petit brillant lorsqu'il aborde frontalement ses sujets politiques, dont les échos sont très actuels et touchent juste ; du déni, voire de l'aveuglement volontaire - face à la montée du fascisme, du rôle des élites dans ce jeu dangereux, de la peur du "socialisme" à l'invention des fake news, le film se double également d'une réflexion sur le langage, sur la manipulation politique et le rôle qu'ont l'écriture et le cinéma là-dedans, moyens éminemment puissants de charmer les masses.
C'est grâce au personnage de Mank que sont abordés ses différents thèmes, lui et son cynisme, sa fausse roublardise qui cache une intelligence affutée et un regard éclairé car en biais, nuancé, sur les réalités sociales de son pays. Et c'est donc évidemment et en grande partie grâce à Gary Oldman que le film tient, l'acteur livrant une grande partition, à classer parmi ses meilleurs rôles.
Le film se réserve alors quelques grands moments de cinéma, vibrants ou intimes : on pense notamment à la soirée d'élection pour le nouveau gouverneur californien, ou à la balade nocturne et arrosée avec l'élégante Amanda Seyfried.
Mais enfin, là où Mank (le film) fonctionne, c'est lorsqu'en parlant de tout autre chose et en rendant à Mank (le personnage) ce qui est à Mank (quitte à ouvertement abîmer l'image d'Orson Welles, et remettre un peu les pendules à l'heure), David Fincher semble réaliser quelque chose de très personnel et parler in fine de lui (de son amour pour le cinéma, de ses inspirations, de ses pairs, de son père, l'écrivain du scénario originel, et de sa manière à lui d'aborder la création d'un film, de son idée première à sa diffusion finale, ...), le tout, dans une démarche presque autistique (celle des grands artistes), qui, en excluant encore plus le spectateur, l'invite paradoxalement.
"And that, my friend, is the magic of the movies."
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Créée
le 9 janv. 2022
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