Mank a gagné?
Le mérite du film, c'est de nous dire que Citizen Kane (1941) a été écrit en majeure partie par Herman Mankiewicz et non pas par Orson Welles. Ils reçurent ensemble l'Oscar du meilleur scénario...
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le 5 déc. 2020
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Dix ans après le remarqué The Social Network, Fincher revient à l'affiche avec un nouveau biopic. Le réalisateur s'intéresse cette fois à la vie de "Mank", Herman J. Mankiewicz, scénariste de génie autant qu'alcoolique dépravé à qui l'on doit le monumental Citizen Kane - sorti en 1941 - rédigé lors de sa convalescence à la suite d'un accident de voiture.
Force est d'approuver que l'immersion dans les années 30 s'avère particulièrement réussie. C'est avec minutie que Fincher retranscrit l'atmosphère de l'époque aidée par une utilisation du noir et blanc particulièrement opportune. Le zèle sera même poussé jusqu'à inclure les "brûlures de cigarettes" que l'on voit apparaître dans le haut du coin droit lors des changements de pellicule. Techniquement il est dur de reprocher quoi que ce soit à la réalisation et encore moins au montage tant il frise l'excellence. Rien de plus normal que la forme soit parfaite quand on est en présence d'un vieux loup comme Fincher.
L'écriture de Citizen Kane sera l'occasion pour Mankiewicz de se remémorer certains souvenirs retranscrits sous forme de flashbacks d'où il tire la matière de son scénario. La mise en abîme opère avec une certaine indolence et sans l'appui de transitions poussées mais instaure une temporalité découpée qui sera essentielle pour comprendre l'état de l'industrie cinématographique ainsi que les personnages que l'on retrouvent et à qui on doit l'inspiration de Mank. Le spectateur se trouve transporté à Hollywood en plein âge d'or à une époque où les studios de production étaient livrés à une concurrence impitoyable ce qui se concrétisait dans la rudesse des contrats passés avec les différents acteurs de la production. La narration est donc orchestrée en va-et-vient continus entre le temps de l'écriture et les souvenirs qui l'alimente. C'est cette forme qui permettra de brosser le caractère de Mank : cynique, joueur et irrévérencieux. Surtout, se superpose un goût effréné pour la boisson, ce dont Fincher ne manque pas d'appuyer parfois avec une certaine lourdeur et à coup de répétitions excessives.
Si le comportement de Mank paraît jubilatoire en première instance, on devient vite agacé par les errements de certaines scènes qui se résument parfois davantage à une brève dialectique de la situation politique qu'à une exploration de la psychologie et des avis du scénariste. Car au bout des deux heures du film on a l'impression de ne pas avoir réellement appris sur Mank si ce n'est de manière grossière et caricaturale - le tout étant souvent trop raccroché à son alcoolisme, le faisant passer pour un gentil génie torturé.
On doit louer le jeu d'acteur de Gary Oldman, précis et juste, sans jamais tomber dans l'écueil de la grandiloquence qui sied à un tel personnage. Malheureusement il est difficile de dire la même chose pour les actrices, notamment Lily Collins dont la monotonie tend vers l'inexistence quand elle lui donne la réplique.
Le tout forme un fatras très inégal, très dense et parfois étouffant, qui permet difficilement d'éclairer la lecture que l'on pourrait avoir de Citizen Kane et semble avoir eu pour seul intérêt de sortir Mankiewicz de l'anonymat où l'avait plongé Welles tout en peignant la satire facile de l'époque. Difficile de juger si un tel biopic restera dans les annales du genre.
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le 5 déc. 2020
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