Marie Madeleine réalisé par Garth Davis

Présentation du film :


Le film Marie Madeleine est un portrait authentique et humaniste de l’un des personnages religieux les plus énigmatiques et incompris de l’histoire. Ce biopic biblique raconte l’histoire de Marie, une jeune femme en quête d’un nouveau chemin de vie. Soumise aux mœurs de l’époque, Marie défie les traditions de sa famille pour rejoindre un nouveau mouvement social mené par le charismatique Jésus de Nazareth. Elle trouve rapidement sa place au cœur d’un voyage qui va les conduire à Jérusalem.
Les critiques :


A l’époque où ce film est sorti en salle, j’avais été attiré par l’affiche, mais, après avoir lu des critiques, j’avais été persuadé qu’il s’agissait d’une mièvre hagiographie Hollywoodienne. Je n’étais donc pas allé le voir. Ce n’est que trois ans plus tard que j’ai décidé de le regarder pour passer le temps. Grand bien m’a pris ! Et combien j’ai réalisé le pouvoir des critiques ! Combien j’ai regretté de m’être laissé influencer ! Les critiques peuvent tuer un bon film dans l’œuf !


C’est ainsi que je me demande comment Frédéric Strauss de Télérama a pu écrire ceci…
« Surfant sur cette place nouvelle que pourrait prendre la femme dans l’histoire sainte, cette production hollywoodienne propose un néo-péplum. Marie Madeleine et Jésus sont joués par Rooney Mara et Joaquin Phoenix. Rien de consistant… »


…et Stéphane Delorme Cahiers du Cinéma cela…
« Ce pensum kitsch revendique cette lecture vaguement féministe, sauf qu’il fait tout l’inverse, Marie-Madeleine étant réduite à suivre la bande des apôtres comme Chico dans Les Sept mercenaires. »


Tout cela me semble produit par une mauvaise foi pervertie de cynisme et d’ ironie malsaine, une mauvaise Foi.
Mon simple regard


Ce film est une merveille, grâce aux acteurs, aux paysages, à la photo, aux éléments et au rythme « malickien », mais surtout par le propos et le choix de Marie-Madeleine pour parler du Christ.
Ce film est incarné, pensé et spirituel !
Des Corps qui vivent, donnent la vie, s’attirent ou se repoussent, meurent.
Des âmes en combat contre elles-mêmes.
Et des esprits qui tentent de s’ouvrir à cette porte de la spiritualité, de la foi, du royaume.
Oui, une Merveille !


Donc me voici devant un film si fascinant que je n’en sors pas indemne. Les questions qu’il éveille voyageront longtemps en moi. Ce film explore les trois réalités humaines : corps, âme, Esprit.
Le corps est placé dans la réalité sociale, d’une violence inouïe. Marie Madeleine est une femme qui refuse le dictât de son père et de son frère qui veulent lui imposer un époux. Le frère la déclare possédée par le diable, comme d’autres qui finissent violées puis assassinées. Le contraste est abyssal, entre cette domination masculine et un prophète qu’elle commence à entendre avant de le voir, et qui, par ses paroles la transforme. Il est celui qui guérit et parle d’un royaume de paix et d’amour. Dans ce film, l’eau est très présente : le corps y est libre de descendre et de se retourner pour remonter vers la lumière. Le dialogue entre la Vierge Marie et Marie de Magdala est d’un réalisme vraiment concret, incarné. Elles se parlent de corps à corps.


L’âme est vue à travers les relations humaines : dans un monde où seules les valeurs masculines existent, Pierre en est symboliquement le représentant ( il est possédé par des valeurs martiales associées à la masculinité.). Marie-Madeleine, quant à elle, incarne des valeurs qu’on pourrait dire « féminines » mais qui sont universelles et font écho en Jésus. Ces valeurs d’écoute, de respect, d’entraide mutuelle, sont mises en scène lorsque Jésus décide d’aller parler aux femmes du lavoir, et demande à Marie-Madeleine « Que dois-je enseigner ? » A ce moment-là, le « soldat » Pierre prend ombrage, craignant de perdre son rôle de première pierre ; on sent alors la réalité du conflit sur lequel l’église a fondé 2000 ans d’histoire. Le moment le plus fort est lorsqu’il reproche à Marie-Madeleine sa présence auprès de Jésus « Tu l’as affaiblie » lui dit-il. Le Pouvoir temporel incarné par Pierre s’oppose à la Puissance spirituelle qui ne peut se manifester que dans les regards et les sourires.


L’esprit, enfin, est le vase de la réalité spirituelle où l’on touche bien la distance entre, d’une part, ce que la religion catholique (devenue système de pouvoir) a créé de concepts, et d’autre part l’homme réellement habité qu’est Jésus. Ce dernier était conscient que ceux qui le suivaient comme Pierre ou Judas avaient leur propre désir de rétablir un pouvoir politique et non de comprendre son message.


Si Jésus s’est senti enfin compris dans sa mission, c’est bien par cette femme. C’est pourquoi c’est à elle qu’il apparaît après sa mort :elle a été la seule à comprendre et à dire que le Royaume d’amour qu’il promettait existait bien en ce monde. Qu’il est déjà dans notre cœur et que cela ne dépend que de nous de nous y rendre.


Le film dit aussi que pour bien parler d’amour il faut le ressentir : Marie-Madeleine est la seule à croire en lui pour ce qu’il est, et pas pour ce qu’elle pourrait retirer de la relation. Elle seule lui donne la force d’aller jusqu’au bout d’une mission dont il connait l’issue et dont il la prévient clairement. C’est subtilement explicite.


Ce film est une merveille parce qu’il ose regarder en face toutes les réalités : la société de l’époque, les structures humaines et psychiques qui nous animent de tout temps… mais il rappelle aussi le vrai message d’amour spirituel, Agape. L’amour spirituel est fondé sur l’espérance que nous pouvons tous participer à améliorer ce monde, ici et maintenant.


La résurrection est juste évoquée comme une réalité sans utiliser d’effets cinématographiques spectaculaires, et c’est très bien ainsi.


Jésus est symboliquement déposé là où se trouve le désespoir de celui qui ne peut que constater l’échec de la civilisation. La solitude qui accompagne cette prise de conscience est vertigineuse. Il ne s’agit en rien d’une image d’Épinal. Représenter le Christ en homme paisible nous empêche peut-être de le comprendre.


Si nous voulons construire une alternative à ce monde sordide par bien des aspects, il est temps d’accepter que non, les premiers chrétiens n’étaient pas une communauté paisible. Rien ne pourra être fait pour changer le monde où nous vivons tant qu’on s’enfermera dans une société de joies illusoires dont nous abreuvent les objets matériels. La seule jouissance du corps est une impasse si elle n’est pas accompagnée par âme et esprit.


Finalement la plus belle critique que j’ai trouvée est sur le site lemagducine


« … Marie Madeleine est une expérience difficile à évaluer, capable d’ennuyer comme de fasciner sans que l’on ne sache jamais vraiment de quel côté on se trouve. Ce qui est sûr, c’est que ces deux heures poussent à la réflexion, à l’implication totale du spectateur, et en cela c’est une proposition de cinéma réussie. Visuellement époustouflant, porté par des acteurs impériaux, Marie Madeleine divisera assurément, de par l’austérité radicale de sa forme et l’opacité de son propos, et ce malgré des échos aux enjeux sociaux d’aujourd’hui dont on ne peut que saluer le traitement. Autrement dit, un film qui sera admiré comme détesté pour des raisons valables d’un côté comme de l’autre : à vous de vous abandonner ou non à ce long pèlerinage contemplatif qui, finalement, se vit plus qu’il ne s’explique. »


MA CRITIQUE SUR MON BLOG

Etienne_Cet
10
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur.

Créée

le 30 déc. 2021

Critique lue 31 fois

Critique lue 31 fois

D'autres avis sur Marie Madeleine

Marie Madeleine
Alienure
6

Le Christ a réalisé un miracle: sauver ce film!

En quoi un énième film sur la vie de Jésus peut être intéressant? La réponse est dans le titre du long-métrage: l’œuvre est censée être centrée sur Marie Madeleine afin de la réhabiliter en tant...

le 25 août 2018

8 j'aime

4

Marie Madeleine
alsacienparisien
7

Toute première foi(s)

Week-end de Pâques en approche, Marie Madeleine s'avère être un bon petit retour aux sources pour rappeler que ce ne sont ni Willy Wonka ni Jack Lang qui ont instauré cette fête traditionnelle.....

le 30 mars 2018

8 j'aime

3

Marie Madeleine
Lys
8

Une pensée féminine qui s'oppose à celle de Pierre ?

Le film ne présente ni l'image d'une Marie Madeleine prostituée, ni une amoureuse éperdue. Elle est ici une femme qui refuse de se définir dans le seul rôle que l'on peut attendre d'elle : épouse et...

Par

le 15 avr. 2018

7 j'aime

Du même critique

Parvana, une enfance en Afghanistan
Etienne_Cet
9

La personne humaine dans toutes ses dimensions

Un film n'est pas mesurable à la quantité de spectacle qu'il nous vend. N'est pas mesurable à une quantité quelconque ! N'est pas mesurable. Une ouvre de création est un don. C'est le don d'une...

le 3 août 2018

1 j'aime

1

Senses 1&2
Etienne_Cet
10

Et si la recherche du temps perdu était filmé comme Senses

J'ai plus appris sur le japon d’aujourd’hui en 2h15 (+1h30 à l'heure ou j'écris) qu'en 40 ans de conversation. Cette chronique a travers le moment clé de 4 femmes japonaise de Kobé est prodigieux...

le 11 mai 2018

1 j'aime

L'Apparition
Etienne_Cet
10

Le secret et le mystère

Un secret cache une vérité ! Un mystère est une vérité ! Nous sommes des corps animé par des âmes (psychés / émotions / sensations) qui pouvons nous ouvrir à l'esprit (spiritualité) par l'approche du...

le 26 févr. 2018

1 j'aime