Difficile d'entrer dans le film quand on a en mémoire le roman de London. Pourtant, il s'agit bien du même récit. Un jeune pauvre tombe amoureux d'une jeune fille riche et tente de réussir dans l'écriture pour s'élever socialement et l'épouser. Dans le film c'est du pur mélo ; le garçon est costaud mais très naïf, le reste des personnages plutôt caricaturaux. Ce n'est pas l'impression qu'on avait en lisant London, mais peut-être s'était-on laissé embarqué par la réputation de l'écrivain ? Le pari de transposer l'action du San Francisco de 1900 à Naples dans les années... à propos quelles années ? Certains signes faciles : modèles d'automobiles, télévision, etc. situent l'action dans les années 60-70. Mais les costumes, les intérieurs bourgeois sont bien antérieurs. Il est fait allusion au fascisme, une scène d'archive montre un autodafé de livres en Allemagne, puis tout se termine sur l'annonce de la guerre : laquelle ? Probablement la seconde, mais rien n'est sûr. L'engagement de Martin Eden est noyé dans le flou historico-politique. Heureusement, à la fin, en passant du mélo au drame dans une trajectoire rise and fall, les choses s'accélèrent et l'on assiste impuissant à l'effondrement du héros en comprenant bien qu'il en a bavé avant d'en arriver où il est et en regrettant qu'il n'ait pas réussi à s'en sortir mieux qu'en devenant un personnage imbuvable. Comme, à la différence du récit de London, on n'a acquis aucune empathie à son égard, on est bien content de quitter enfin la salle après avoir vérifié que le texte initial est respecté. Mais pas l'esprit. Dommage..