Marty
6.8
Marty

Film de Delbert Mann (1955)

Ernest Borgnine est Marty, aimable boucher, dernier célibataire d’une fratrie italienne, timide célibataire et gentil garçon qui vit toujours avec sa vieille mère. Si bon qu’il se soucie même d’héberger son aigre tante pour soulager son cousin. Ni transcendant de beauté ni repoussant, loin de là, Marty subit les amicales questions de ses clientes, les veules empressements de ses amis pour se marier. Ce samedi soir, sa mère insiste pour l’envoyer danser. Mais l’homme, à trente-quatre ans, s’est résigné :



« Whatever it is the women like, I ain’t got it »



Malgré tout, le garçon se retrouve au dancing. Témoin d’une rude impolitesse envers une jeune fille éplorée, Marty tente gauchement sa chance. Alors c’est une nuit de rencontre mémorable et anodine, envoûtante d’honnête simplicité et de complicité naissance. Une nuit qui s’allonge et se prolonge dans un confort évident. Marty est libre, à l’aise. Clara aussi. Elle l’aide à accepter l’homme qu’il souhaite devenir, il lui renvoie l’image.


Delbert Mann réalise une comédie romantique à l’exposition longue mais agréablement compatissante pour la chanter d'éternelles évidences tendres. Toujours au plus près du jeune et solide Ernest Borgnine, magnifique de fragile assurance, éclatant de résignation dramatique, la caméra s’imprègne d’une face du miroir de l’amour pour lancer l’attraction : Clara (Betsy Blair) est le reflet de Marty, ils se comprennent de tout leur être.


Mais c’est New York ici. La famille italienne épanche ses désillusions au cœur du foyer de Marty, sa mère se méfie d’une soudaine fiancée qui viendrait lui ravir son trésor, les amis se désespèrent de ne plus s’épauler de sa compagnie, et le pauvre homme, tiraillé par l’enfer des habitudes, par la fatalité de sa morne banalité, ne rappelle pas Clara.
Attends…
Oui, t’inquiètes !
C’est New York, ça pétille d’espoir dans l’intimité d’une cabine de téléphone public.


Palme d’Or peut-être surévaluée, Marty semble poser certaines recettes de



la comédie romantique new yorkaise



dans l’utilisation sociale des mécanismes traditionnels et populaires de la rencontre, ce réalisme socio-urbain fait de fête et d’entêtement, que vient troubler la rencontre inopinée, évidente, le point d’ancrage d’une autre réalité banale mais qui prend des airs d’extraordinaire. Le rythme mêle les émotions, tendresse et rire, amertume, espoir, les doses ne sont pas toutes idéales mais l’idée est là.


Dans le fourmillement maladif et oppressant de la grosse pomme, l’inéluctable attraction d’un homme et d’une femme rapprochés par le hasard, et par-dessus les obstacles inattendus, réaliser l’amour en prolongement de soi, évident, indispensable.


Matthieu Marsan-Bacheré

Créée

le 12 déc. 2015

Critique lue 534 fois

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