Marvin (d'après "En finir avec Eddy Bellegueule") : pas vraiment un mauvais film ; il y a des passages réellement émouvants ; et pas mal de très bons acteurs. Dans le rôle titre, Finnegan Oldfield crève vraiment l'écran.
Cependant il y a quand même un gros problème (pas seulement politique, mais aussi esthétique) dans la représentation de la famille du héros. Le père est caricatural à un point que ce n'est pas possible : on le croirait sorti d'un sketch de Coluche. La première partie du film met vraiment très mal à l'aise.
En y repensant, j'ai l'impression que le malaise que provoque le film tient au fait que la richesse psychologique est inégalement distribuée selon les personnages. Et que cette caractéristique était déjà présente dans le livre, même si elle était masquée, ou légitimée, par le fait qu'il s'agissait d'un récit à la première personne. Or là, comme on voit tous les personnages en troisième personne, la différence de traitement n'en est que plus flagrante.
Que ce soit dans le bouquin d'Edouard Louis ou dans le film, la famille du héros est absolument dépourvue de toute profondeur psychologique (ça s'infléchit un peu sur la fin, mais bon) ; le père, en particulier, n'a aucune intériorité. Alors que Marvin/Eddy, lui, en a une, mais aussi, dans le film, ses amis intellos artistes gays (Abel et Pierre). Le pire, c'est que l'absence de psychologie des prolos prend comme alibi la prétention sociologique de l'auteur (ou de la réalisatrice) : ce ne sont pas des personnages, ce sont des fonctions sociales... Donc l'affaire est pliée... Seuls Marvin/Eddy et ses amis gays parisiens intellos artistes peuvent accéder au statut de personnage... A ce compte-là, dans la représentation des différents milieux sociaux, les dés sont pipés dès le départ.