Dans Guillaume et les garçons à table, Guillaume Gallienne se filmait sans complaisance, mais sans s’humilier pour autant, avec dureté parfois, mais avec amour surtout.
Bref, G. Gallienne sait bien parler de lui.
Mais sait-il parler aussi bien des autres que de lui-même ?
Hélas, peut-être pas. Du début à la fin, Maryline subit : et un personnage qui toujours subit et jamais n’agit, c’est pénible.
Jamais elle ne prend d’initiative, jamais elle n’est active (j’exagère, à un moment, elle donne une baffe, et… c’est tout). Elle est objet de désir, mais ne désire pas beaucoup. Elle vit aussi bien des choses déplaisantes qu’heureuses – Gallienne réserve d’ailleurs le monopole du déplaisant au cinéma, et celui de l’agréable au théâtre, soit - , mais ce n’est jamais ni de sa faute ni de son initiative.
« Moi, je n’ai pas de but », avoue-t-elle. Vraiment ? Serait-ce si insensé qu’elle soit guidée par un besoin impérieux de devenir actrice, qu’elle ait une vocation ?
Elle est surtout, beaucoup, beaucoup humiliée. Par les hommes, mais aussi par des femmes ; par les mots, par des gestes, par des événements, par l’alcool ; physiquement, moralement…
Au bout d’un moment, c’en est trop : lorsque je veux voir un personnage féminin subir humiliation sur humiliation, j’ouvre un bouquin de Sade, je ne vais pas voir un film de Gallienne.
Plonger un personnage passif dans un monde d’humiliations est un dispositif peut-être intéressant (pour dire la vérité d’un métier difficile, pour montrer l’inhumanité d’un milieu…), mais je le trouve dérangeant : quelle vision des actrices, et plus globalement, des femmes, ce film est censé véhiculer ?...
Il me fait m’interroger sur les intentions de Guillaume Gallienne, qui a pourtant l’air d’être un homme si charmant et intelligent.
Jusqu’à l’avant dernière scène (un peu téléphonée, mais efficace, et qui joue encore avec les humiliations de Maryline…), j’ai donc trouvé ce film détestable.
Mais la dernière scène a changé mon sentiment vis-à-vis du film : cette détestation s’est transformée en regret. Car le film aurait pu être beaucoup plus solaire, comme il l’est dans cette dernière scène, la plus étonnante et la plus émouvante. Plus tôt, lors de la rencontre de Maryline avec le dramaturge, le film esquisse un virage vers la légèreté, le décalage et la douceur… qui faisait tout l’intérêt de Guillaume et les garçons à table !
Quel dommage que le film préfère s’appesantir sur les humiliations et la passivité de ce personnage…