Suite à un remake de qualité, qui proposait une nouvelle approche de la mythologie Leatherface au cinéma, peu décidé à ne pas exploiter au maximum le potentiel de son succès, les producteurs (dont Michael Bay fait partie) ont la merveilleuse idée de proposer une origin story. Nous apprenons donc que Leatherface s’appelle en réalité Thomas, ce qui s’avère tout de même beaucoup moins énigmatique, et s’il est devenu le monstre qu’il est, c’est parce qu’il a perdu son emploi. Oui, « The Texs Chainsaw Massacre : The Beginning », en plus de ne servir à rien, balaye allégrement toute notion de mystère, et cherche à tout expliquer et à tout justifier. Meh !
Dès les premières minutes du métrage, tout espoir d’avoir affaire à un truc un tant soit peu original disparaît. Tout se révèle surfait, et terriblement attendu, les personnages trainent leur cliché comme un boulet au pied, et correspondent tous à des conventions génériques essoufflées et dépassées. Ô surprise, pour pimenter le tout, l’ensemble du casting se surpasse dans un jeu de mauvaise qualité, en surjouant absolument tout. Bon, il est vrai que devant une œuvre à 16 millions de dollars, il ne faut pas se montrer trop exigeant. Mais quand cette production veut mettre en scène les origines d’une icône de l’horreur à l’hollywoodienne, ça passe tout de suite beaucoup moins bien.
À la réalisation, Jonathan Liebesman, le Yes Man favori de Michael Bay, n’accomplit absolument aucun effort (comme d’hab’), et se contente de reprendre l’esthétique développée dans le précédent remake, par Marcus Nispel. Plate et sans profondeur, la mise en scène copie un style « gritty » qui dans le milieu des années 2000 devient une norme visuelle de l’horreur à Hollywood. Ce visuel est marqué par celui de Nispel, qui le reprend d’ailleurs dans son remake « Friday the 13 th » en 2009. Totalement impersonnel et générique, le travail de Jonathan Liebesman ne rend pas service à cette entreprise plombée d’avance.
Jusque-là, rien de bien nouveau au pays merveilleux de l’exploitation horrifique. Puis, avec le recul, il est vrai que le métrage propose quelques séquences bien senties, qui tiennent la route, et pour peu que l’on mette certaines exigences au placard, il y a moyen d’en tirer un certain plaisir. Si le propos apparaît somme toute un peu vain et rapide, il y a en sous-texte un petit message pas inutile sur le déclin des campagnes américaines, laissées à l’abandon par un exode rural massives. Alors attention, cela est traité avec les pieds, et le seul portrait qui reste se révèle celui de white trash clichés, reléguant cette furtive critique qui ne sert pas à alimenter la narration. Le film demeure en effet un survival classique, sans trop d’ambitions, ce qui est dommage.
De temps à autre, le récit est ponctué de fulgurance, à l’image de cette séquence où Leatherface (ou Thomas…) se confectionne son masque, ce qui laisse apercevoir un potentiel non exploité. Dans l’ensemble, l’opération se révèle tout de même des plus vaines, car à vouloir absolument expliquer et montrer la genèse d’une mythologie (dont tout le succès se base sur le mystère), le film évente l’inattendu et la terreur inhérente à celui de 1974, mais aussi au remake de 2003. La seule chose qui lui reste alors ce sont les séquences trash, horrifiques et gores, qui bien que répétitives sont plutôt bien réalisées, merci aux effets spéciaux réussis.
C’est là ce qui sauve le film du naufrage total, du gore sympathique, et la capacité de Jonathan Liebesman à recopier visuellement une œuvre plus aboutie. En fait, ce film ne serait pas estampillé « Texas Chainsaw Massacre », et se contenterait d’un récit très proche de ceux de la saga « Wrong Turn » (fortement inspirée par l’œuvre de Tobe Hooper), il pourrait presque être pas mal. Mais il souffre de l’héritage de ses aînés, au point même de rendre le quatrième volet, complètement foutraque, des plus sympathiques, car il faisait preuve d’une réelle sincérité. L’ombre de la saga pèse beaucoup trop sur cette préquelle de remake, dont l’existence même constitue une aberration.
Sans véritable folie, déclinant une générosité frileuse et un manque d’authenticité criant, « The Texas Chainsaw Massacre : The Beginning » compose une œuvre de pop culture de mauvaise qualité, qui cache du potentiel. Elle n’existe que comme un abreuvoir à fan service, qui ne s’adresse pas à grand monde, et de manière maladroite. Il témoigne cependant du véritable échec de la franchise, par sa nature d’œuvre lambda, qui n’a rien à raconter de plus que l’original (ou son remake), mais qui prend tout de même 1 h 30 pour le faire. Et en plus, Leatherface s’appelle Thomas.
-Stork._