Matrix Regression

Ô désespoir ! Ô vieillesse ennemie ! N'ai-je donc tant vécu que pour
cette infamie ?

L'annonce d'une suite à la trilogie des Wachowski m'avait laissé dubitatif, la bande annonce d'il y a quelques mois ne m'avait pas fait ressentir + de choses : je ne savais pas comment appréhender ce projet, je n'étais ni enflammé, ni stressé.

Il a pourtant fallu quelques jours après ma séance pour me remettre de ce qui est clairement une douche froide... :(

Sur la forme, le film se rate dans tout ce qu'il entreprend : les scènes d'action sont médiocres (et souvent illisibles), les SFX quelconques, la musique passe-partout et la réalisation générale sans âme (voir même assez horrible par moments). Bref, tout ce qui constituait la force de la trilogie, indépendamment de tout l'aspect réflexif. Et déjà, ben ça, ça fait mal ! (c'est à se demander si ça n'était pas Lilly qui était performante à ce niveau).

Les Matrix étaient des marqueurs à ce niveau, à mon sens, il était indispensable, même en faisant une autre proposition, d'être au moins aussi novateur qu'à l'époque...

En ce qui concerne le fond, ça n'est malheureusement pas beaucoup mieux. Les pistes intéressantes qui sont abordées

sont survolées le temps de 2 scènes

Les retours de personnages vont du "ça fait plaisir" (Neo et Trinity) à "aucun intérêt"

inutile

en passant par le franchement gênant

Quand à

passé la pirouette du début, il n'est finalement qu'un personnage fonction désincarné.

J'avais l'impression que l'histoire d'amour entre Neo et Trinity allait être la colonne vertébrale du film et lui donner tout son intérêt. J'avais à moitié raison : c'est effectivement la moëlle du film mais la cuisinier a oublié d'y ajouter du sel.

On pourrait me retorquer (et on va sûrement me le faire ^^) que le film n'est pas un remake ou reboot fainéant, etc., que le film devait se réinventer. Et sur le principe, je suis d'accord. Mais l'entreprise de déconstruction de la trilogie n'est pas aboutie, dans le sens où cette déconstruction ne se fait pas au profit d'une autre proposition, on démonte juste pour démonter.

Toute la lecture méta est, au mieux, sans trop d'intérêt, au pire assez maladroite. Et la scène post-générique, qu'on me vendra peut-être comme une dénonciation de ce qui se fait maintenant n'amène pas, encore une fois, à une autre proposition : c'est donc une dénonciation qui ne fait que rentrer dans le rang, qui surfe juste sur cette mode.

Et que, ce qu'il essaye de faire (questionnement sur l'identité, etc.), la précédente trilogie le faisait mieux. Sur cette thématique, c'est Sense8 qui a su prolonger la réflexion et avec la qualité que l'on sait.

Je ne sais pas si c'est la plus grande déception de ces dernières années pour moi (vu que, comme dit en préambule, je n'en attendais rien, contrairement à un Prometheus par ex.) mais ce fut vraiment une séance douloureuse, ce qui explique la note sans équivoque.

Un ami, aussi déçu que moi, se demande si ça n'est pas une sorte de suicide artistique de Lana, qui galérait avec sa sœur depuis de nombreuses années. Je suis assez à l'aise pour le croire. En tout cas, pour le regretter.