Max et les Maximonstres est une petite merveille. Libéré de la présence du scénariste Charlie Kaufman avec qui il avait travaillé sur ses deux précédents films, Dans la Peau de John Malkovitch et Adaptation, Spike Jonze livre une adaptation brillante du livre pour enfants éponyme de Maurice Sendak.

Dans les grandes lignes Spike Jonze nous raconte la même chose que Maurice Sendak, à savoir la fuite d’un enfant indiscipliné dans son imaginaire après avoir provoqué la grosse colère de sa mère. Le traitement diffère grandement, changement de support oblige. Cette fuite est en fait un voyage initiatique du jeune Max, qui ne comprend pas le monde des adultes. Un enfant égoïste, et cruel. Et si le film ne parlera pas aux enfants c’est justement qu’il s’agit d’un film sur l’enfance et ses drames, qu’on ne comprend qu’une fois passée cette étape. Max représente l'enfant dans son statut universel, avec toutes les facettes contradictoires qui le caractérisent : passer du rire au larmes, vouloir tout diriger, mais se sentir en sécurité et guidé, créer des liens intenses avec les autres pour se construire et apprendre. En quête d'affection permanente, il cherche constamment du répondant auprès de son entourage : sa grande sœur, sa Maman, son maître d'école. Il nous montre les méfaits de l’absence du père, cette sensation terrible de toujours sembler manquer d’attention, cette incompréhension totale vis-à-vis du monde qui nous entoure et des préoccupations lointaine des adultes. Max et les Maximonstres parle à nos souvenirs, c’est en cela qu’il est si puissant sur le plan émotionnel.

La plus belle chose qu’on nous montre, c’est l’incroyable pouvoir de l’imaginaire de l’enfant chez qui il constitue un véritable rempart contre les assauts d’une réalité ingérable. Ainsi ce voyage au pays des choses sauvages n’est rien d’autre qu’une quête de soi-même mais illustrée par l’esprit d’un enfant de 9 ans. Ainsi ce trip catalyseur prend la forme de décors infinis qu’on a tous traversé dans nos rêves de gosses, où se mêlent forêts et déserts, et au milieu il y a ces monstres. À la fois mignons et hideux, sympathiques et effrayants, ils cristallisent les multiples facettes de l’enfant. Carol l’instable colérique, incarne la créativité, la folie ; Douglas est la loyauté incarné ; Alexander le laissé pour compte, toujours dans la crainte et la timidité ; Ira le sage, empreint de douceur ; Judith la sarcastique mais mesuré ; et KW très maternelle mais sans cesse au bord de la rebellion. Tous sont attachants, car tous sont de grands mélancoliques, et tous semblent manquer de la présence d’un père ou d’une mère. Toute en symbolique, cette escapade ne fera que rapprocher Max de sa mère, comme une véritable prise de conscience le temps d’une seconde naissance. Si cela fonctionne c’est en grande partie grâce à tous ces comédiens géniaux dans la peau des monstres mais surtout grâce à la performance assez bluffante du jeune Max Records. Le jeune comédien insuffle toute cette hargne, cette folie tantôt latente, tantôt débordante, cette douceur, cette mélancolie, avec une justesse et un naturel incroyables. De son regard parfois perdu, parfois extraordinairement lucide, il déploie une palette d'émotions impressionnante sans tomber dans le surjeu.

Avec sa mise en scène virtuose qui colle aux errances de Max, à savoir caméra à l’épaule et des cadres majoritairement en contre-plongée, Spike Jonze donne corps à cette histoire et réussit assez facilement à nous émouvoir. Ces bestioles nous paraissent étrangement réelles et familières, et leur douleur latente qui apparait au grand jour le temps d’une pourtant gentille bataille de boue également. Des rayons de soleil qui percent les arbres, la fabuleuse composition de Carter Burwell et Karen O. finissent d’achever cette ambiance incroyable. Il se dégage de Max et les Maximonstres une mélancolie permanente, une souffrance intérieure personnalisée dans ces monstres. Et si on pourra regretter quelques fautes de rythme et une tendance à la redite sur quelques scènes, on tient là un film majeur sur l’enfance et son côté sombre. Le final déchirant nous rappelle ce terrible jour où nous avons dit adieu à nos amis imaginaires, quand on a rangé pour de bon nos peluches et jouets et qu’on a enfin pris conscience de nos responsabilité de fils/fille, c’est bouleversant.
KanedaShotaro
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le 29 avr. 2013

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Kaneda

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