Après Pour Elle, film étrangement vendu comme un drame et cachant en réalité un thriller palpitant, Fred Cavayé revenait en 2010 avec A Bout Portant, 1h30 haletante dans les rues de Paris et sans doute le meilleur rôle de Gilles Lellouche. En deux films, Cavayé s’est donc fait un nom et une réputation, celle d’être capable de tourner un polar nerveux tout en insufflant un véritable background à ses personnages et une émotion vraie mêlée à l’action.
Quand nous l’avions croisé il y a trois ans, il avait évoqué un projet de film se déroulant dans une forêt canadienne avec des bucherons. A notre plus grande surprise, il revient plutôt avec un polar mettant en scène les acteurs principaux de ses deux précédents films : Vincent Lindon et Gilles Lellouche.

L’histoire se déroule et Marseille et commence sur une longue exposition des personnages. Deux flics, ce qu’ils étaient, ce qu’ils sont devenus après un accident de voiture ayant provoqué la mort d’une famille. L’un (Lellouche) continue son chemin, l’autre (Lindon) ivre lors des faits s’est fait virer et tente sa chance en tant que convoyeur de fond. Encore très marqué par l’évènement, il tente vainement de recoller les morceaux et de se retrouver avec sa femme et son fils, eux qui ont pris leur distance.
Contrairement à A Bout Portant qui démarrait cash pour mieux se développer au fur et à mesure de l’action, Mea Culpa prend son temps. Parce que l’histoire de ses deux hommes est importante, et qu’il faut s’arrêter pour mieux l’appréhender et comprendre leur motivation. Parce que l’impact de ce qui va suivre sur le personnage de Lindon, en quête de rédemption comme le dit le titre du film, sera fort.
En effet, alors qu’il assiste à une corrida, Theo (le fils de Simon/Vincent Lindon, incarné par le jeune Max Baissette de Malglaive, incroyable de naturel) est le témoin d’un meurtre. Tout va alors s’enchainer : les tueurs vont vouloir le retrouver, mais ce sera sans compter sans son père prêt à reprendre les armes et à son ancien complice.
L’union sacrée de deux flics qui ont tout partagé face à une bande de gangsters sans limite.

Longue exposition donc puis Fred Cavayé passe la seconde et n’arrêtera le bolide qu’au générique de fin. Le réalisateur retrouve le rythme de la fin de Pour Elle et d’A Bout Portant, Mea Culpa devient soudainement un film incroyablement intense, où de très brèves pauses viennent ponctuer le récit pour permettre au spectateur de reprendre son souffle. Et si Lellouche joue très correctement, Vincent Lindon y incarne un père prêt à tout pour protéger son fils incroyable. Complétement habité par le personnage qu’il incarne, le comédien livre pour son premier rôle de flic sans doute la meilleure performance d’une carrière déjà bien riche.
Quand à Cavayé, il s’amuse d’avantage que dans ses précédents films. Mea Culpa est un vrai polar du dimanche soir, mêlant quelques touches d’humour à la limite du buddy movie, une ambiance très noire et dramatique et des scènes osées à la limite de l’exagération – à l’image d’une séquence dans un parking où on voit une voiture bouger, une fille collée à une vitre… scène qui n’est pas ce qu’on l’on peut croire mais une grosse baston au corps à corps dans un habitacle. Poursuite, bagarres, fusillades. On en prend plein les yeux à un rythme dément, le tout porté par la musique d’un Clint Mansell (Drive) en grande forme, une photo impeccable et un lot d’émotion.

On a peine à croire qu’on est face à un film français, plutôt dans une production à mi-chemin entre Richard Donner et Michael Mann. Ici point de long discours en plan fixe dans une cuisine, de personnages pleurant au mieu, de drames larmoyant ou de comédie sans intérêt, point de comédiens venant cachetonner et de réalisateur peu inspiré. Mea Culpa est un vrai film de flics porté par des gens impliqués et passionnés. Le cinéma populaire français, le divertissement de qualité, que l’on attribuait autrefois à George Lautner retrouve ses lettres de noblesse en la personne de Fred Cavayé.
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le 3 janv. 2014

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