Ayant investi une partie de sa fortune personnelle pour réaliser son long-métrage ultime, c’est avec un projet de très longue date que Francis Ford Coppola nous sort son Megalopolis à 85 ans tout de même. Depuis 2011 avec Twixt, il se faisait discret la plupart du temps jusqu’à aujourd’hui (sauf quand il s’est exprimé sur Marvel mais c’est une autre histoire). 13 ans pour reprendre la réalisation et revenir avec le long-métrage de sa vie, celui pour lequel il s’est le plus investi et qui s’est retrouvé sélectionné officiellement au festival de Cannes. Par contre, quand le long-métrage est sorti au grand jour, le public n’a pas été très réceptif et on peut comprendre pourquoi après le visionnage. On dirait que Coppola a voulu faire sa vision de l’utopie (peut-être même du cinéma) amenée à la dystopie mais de manière assez étrange (par rapport aux définitions), notamment dans les derniers actes.
Positif
- Cesar Catilina (Adam Driver) est un architecte qui souhaite construire sa ville idéale, Megalopolis malgré que celle-ci ne soit pas acceptée et qu’il ait pas mal d’adversaires contre qui lutter comme le maire de la ville ou des gens de sa famille. En tant que protagoniste, on sent que Coppola a voulu s’identifier à lui et il n’en demeure pas moins intéressant. Sincèrement, suivre un architecte avec une certaine vision mais qui semble assez rejeté de tous, c’est pas mal. Après, ça aurait été mieux si son don d’arrêter le temps s’avérait plus utile que ce qu’on voit mais c’est déjà pas mal. Mais avoir un génie qui veut inventer sa ville avec son propre matériau, c’est réellement intéressant.
- Franlyn Cicero (Giancarlo Esposito) est le maire de la ville et il est fermement opposé à Cesar en pensant que celui-ci pourrait détruire la société et tout ce qui a été construit. On peut comprendre son opposition à ses idées dans le sens où il a sa vision des choses et que la société est déjà bien telle qu’elle est pour lui. Après, c’est tout de même un homme attachant qu’on comprend et qui veille sur sa famille.
- Julia Cicero (Nathalie Emmanuel) est le fille du maire, elle semble porter pas mal d’intérêt à la vision de Cesar et de ce qu’il pourrait faire avec sa Megalopolis. Certes, elle nous est d’abord présentée en tant que fêtarde avec sa copine intime mais elle semble réellement porter attention et comprendre où Cesar veut en venir. Elle devient un peu plus intéressante au fur et à mesure des évènements, avec des choix compréhensibles.
- Hamilton Crassus III (Jon Voight) est un banquier important et l’oncle de Cesar. C’est un homme âgé mais assez lucide pour veiller sur la banque et ses intérêts. Il n’a pas un grand rôle à jouer mais il a l’air sympathique malgré ses goûts un peu douteux.
- En terme de symbolisme, on a des idées intéressantes. On a Megalopolis pour Cesar comme Coppola avec le cinéma, son don d’arrêter le temps lier à sa manière de faire du cinéma que certains ne comprennent pas ou qu'il voit différemment des autres (oui, ça fait prétentieux), ou encore Julia qui y croit… Non vraiment, le symbolisme fonctionne bien et l’identification se comprend.
- Pour les costumes, on sent qu’ils se sont un peu lâchés. Franchement, les costumes ont été grandement soignés pour la plupart des séquences et arrivent à définir la plupart des personnages, notamment Cesar qui porte souvent du noir. Après, on y fait pas réellement attention mais c’est réellement de très bonne facture.
- Le long-métrage démarre par Cesar qui se prépare à sauter d’un toit avant de découvrir qu’il a le pouvoir d’arrêter le temps et se sauve de la mort. C’est une introduction plutôt pas mal pour présenter le personnage principal, le démarquer des autres et nous donner envie d’en savoir plus sur lui et ce don.
- La relation entre César et Julia est plutôt pas mal. Elle voit en lui une sorte d’inspiration en essayant de croire en lui malgré les rivalités de celui-ci avec son père et lui retrouve foi en ce qu’il fait grâce à elle. Ça apporte réellement une relation plutôt pas mal entre les deux.
- La fin est plutôt pas mal en soi car elle apporte un message essentiel en effet, pensez au futur du monde et donc aux enfants. Même si ça manque d’évolutions de personnages, il est vrai que la fin est d’assez bonne facture.
- Mine de rien, il est vrai que le long-métrage nous surprend pas mal lors du premier visionnage. Entre certains évènements et certains personnages avec leurs manigances, il est vrai que l’inattendu semble fonctionner.
- Question décors, malgré quelques effets spéciaux et changements de style discutables, ça s’en sort pas si mal que ça. Rien de transcendant mais on a réellement des décors assez travaillés en général.
- Mine de rien, le casting s’annonce très intéressant. Entre Adam Driver, Aubrey Plaza, Shia LaBeouf, Giancarlo Esposito, Jon Voigt et Laurence Fishburne, on a réellement un casting intéressant.
- En dehors d’un acteur, le reste du casting semble s’en sortir. Enfin, la plupart des rôles semblent réellement nous convaincre en fonction de l’acteur / l’actrice qui l’incarne à l’écran.
- Visuellement, on a quelques visuels intéressants. Bon, sans prendre en compte les FX, ce sont réellement des visuels intéressants qu’on nous propose à quelques instants.
Négatif
- Wow Platinum (Aubrey Plaza) est une journaliste très réputée qui perd de l’audience tout en étant folle amoureuse de Cesar. Elle a beau essayer de l’oublier pour privilégier ses intérêts, on voit à quel point elle est dangereuse et déterminée de récupérer puis de faire payer Cesar. Après, le souci est qu’elle n’apporte réellement pas grand-chose à l’histoire en elle-même. Elle a beau être un personnage manipulateur et intéressant, ça n’a pas empêché que ses interventions n’ont pratiquement pas servi.
- Clodio (Shia Labeouf) est le neveu de Crassius et le cousin de Cesar, c’est un garçon qui adore faire la fête malgré une image catastrophique et qui souhaite se venger de son cousin avant tout. Il a une bonne motivation mais il n’agit pas beaucoup. Le coté de le faire aller du coté du peuple pour ses intérêts est une bonne idée, mais ça n’aboutit pas en vérité vu que César n’a pas de répercussion. En plus, les séquences où il est présent ne sont pas très intéressantes donc il est pas mauvais mais il aurait pu être bien mieux que ça.
- En terme d’univers, c’est un peu difficile à cerner. On alterne des passages qui font réalistes avec un peu de visuels fantastiques de certaines séquences, à se demander si l’univers n’est pas un peu instable pour les spectateurs. En plus, on nous dit qu’il s’agit de la Nouvelle Rome un millénaire plus tard mais ça ne semble pas très convaincant en vérité.
- En terme d’émotion, c’est raté. Malgré que Cesar soit un protagoniste intéressant, ça ne veut pas dire qu’on est forcément attaché à lui, sans compter que les moments qui se veulent émotionnels n’arrivent pas à nous convaincre. Même le fait que Coppola s’identifie à Cesar ne rend pas le personnage plus attachant pour les spectateurs.
- En terme d’effets spéciaux, certaines séquences marchent mais la plupart sont discutables. Non mais vraiment, les effets spéciaux ne sont pas toujours bien gérés ici, surtout quand Julia voit le monde imaginé par Cesar, ça pique les yeux. Enfin, ça alterne entre les passages pas trop mal et ratés en terme d’effets spéciaux.
- Il faut qu’on parle de ces fonds verts qui sont une catastrophe. Non mais vraiment, la plupart des fonds verts de ce long-métrage se voient à mort et on a du mal à croire à ce que le long-métrage propose visuellement à cause de ça. Des fonds verts aussi visibles comme ça en 2024, c’est réellement honteux.
- Un souci majeur est que le long-métrage manque d’évolution. Non mais vraiment, on a l’impression qu’ils sont tous restés les mêmes mais que certains ont payé les conséquences de leurs actes, c’est tout. C’est regrettable de ne pas avoir réellement vu d’évolution chez certains de nos personnages.
- C’est dingue comment il ne se passe pas grand-chose dans ce long-métrage. Visuellement, on a quelques beaux passages mais on a tout de même l’impression que le long-métrage traîne en longueur alors qu’il ne fait que 2h12, c’est tout de même étrange.
- Malgré qu’on ait des personnages intéressants, on ne s’attache à aucun d’entre eux. En soi, ce n’est pas dramatique mais il est réellement difficile de ressentir de l’attachement par un des personnages qui nous sont proposés ici.
- Le jeu d’acteur est investi pour la plupart mais pas tous. Par exemple, on a Adam Driver qui semble réellement avoir du mal à cerner son personnage, ce qui est problématique quand on sait qu’il tient le rôle principal.
- Malgré des trahisons et de l’inattendu, aucun moment de tension n’est efficace. En effet, il est difficile de ressentir de la réelle tension pour des personnages pour lesquels on a aucun attachement émotionnel.
- Les musiques ne sont pas mal mais elles s’oublient rapidement. Déjà qu’elles semblent omniprésentes, c’est difficile de retenir une des musiques lorsque le long-métrage est terminé.
- Question mise en scène, ce n’est pas mauvais mais on a eu bien mieux par le passé. En dehors de quelques petites séquences, la mise en scène ne semble pas si travaillée que ça en vérité.
!!! PARTIE SPOIL !!!
- La fin fonctionne bien, entre Wow qui se fait tuée par son mari, Clodio qui se prend une flèche dans les fesses puis le peuple dont il devait s’occuper qui se charge de lui et Cesar qui a officiellement construit Megalopolis pour l’avenir du monde et le bébé qui a hérité du don d’arrêter le temps, c’est une bonne manière de conclure et de penser un peu à l’avenir. Pas en ayant une suite mais juste en réfléchissant à l’avenir qu’ils auront.
- Dans un monde dystopique, c’est étonnant de voir des personnes riches se disputer la virginité de la sœur de Cesar, surtout quand une fausse vidéo est montrée avec elle en train de coucher avec son frère. Après, c’est un passage liée aux différentes épreuves de Cesar mais ça semblait être une vidéo bien faite. Une vidéo qui peut être diffusée mais où les téléphones portables ne semblent pas exister, bizarre non ?
- Le metalon (qui est de l'acier) est tout de même un matériau / minerai incroyable ici. Il peut servir pour construire des bâtiments mais il peut aussi aider à régénérer la peau comme c’est le cas pour Cesar après qu’on lui ait tiré dans la tête. Attention, il ne récupère pas sa peau tout de suite, il faut du temps pour que ça se régénère mais c’est tout de même incroyable de voir ça.
Au final, Megalopolis est un long-métrage très personnel de la part de Coppola mais qui, malheureusement, n’apporte pas de grand intérêt. Il a beau avoir été passionné et inspiré, l’exécution est tout de même bien discutable sur pas mal de points. Malgré quelques bons personnages, des décors corrects, un jeu d’acteur efficace et une représentation intéressante de sa personne en Cesar, ça ne nous fait pas oublier le reste. Les effets spéciaux discutables avec des fonds verts trop voyants, quelques personnages peu intéressants malgré des bonnes idée, un univers étrangement géré, le manque d’évolution des personnages et le manque d’attachement envers les personnages. Bref, Megalopolis a beau être le dernier film officiel de Coppola, ce n’est pas un final grandiose dont la majorité des gens voudront se souvenir. Pour un réalisateur d’une si grande envergure, on ne pensait pas que son ultime film serait à ce niveau-là.