Quand on voit la trajectoire de Bérénice Bejo, Gérard Jugnot avait vu juste à l'époque avec un titre pareil. Sa critique du petit monde du cinéma m'a paru bien superficielle. Oh, il sait sûrement de quoi il parle pour fréquenter les plateaux depuis l'époque du Splendid. Mais là, il en dresse un portrait assez négatif. Rempli de gens dont on ignore un peu les fonctions exactes. Les fameux assistants des assistants. Le producteur mielleux. Le réalisateur qui couche avec ses actrices.
Bon. Il y a quand même les dialogues truculents d'Isabelle Mergault. Pas mal de bons mots ou des jeux de mots faisant mouche. C'est comme Pinot. C'est léger, marrant, amusant. Pas prise de tête. Mais chez Jugnot réalisateur, le rire laisse place à l'émotion. Au drame. A la gravité. A la critique sociale. C'est ce coiffeur au physique ingrat ne s'assumant pas. Est-ce que c'est aussi le cas de Jugnot dans la vraie vie ? C'est ce coiffeur aimant profondément sa fille et ne pouvant se résoudre de la voir lui filer entre les doigts pour un métier des plus précaires.
D'un côté, il faut qu'il mette de l'eau dans son vin. Il ne peut pas contrôler sa vie en lui forçant de reprendre le salon d'un concurrent alors qu'elle n'a pas l'air d'aimer ça. De l'autre, il s'en est toujours occupé tout seul. Il l'aime. Il lui propose un travail. Elle pourrait faire preuve d'un peu plus de reconnaissance. Un travail, c'est un travail par les temps qui courent. Certes, il ne connaît rien à l'univers du cinéma et passe pour un guignol quand il en parle car il ne maîtrise pas le vocabulaire. Mais avec des ciseaux, c'est l'inverse. Il est passionné. Il aime ce qu'il fait. C'est un artiste dans un autre domaine. Donc exigeant autant avec les autres qu'avec lui-même car il veut faire du bon travail.
Malheureusement, on a là deux personnalités très fortes avec des positions à l'opposée l'une de l'autre. Pas facile. Pas facile de pardonner vu les mots durs échangés. Moi, j'aurais un peu plus de mal que lui. Sans doute qu'on efface tout plus vite quand on a des enfants. J'ai de la sympathie pour lui. Mais qu'il laisse sa fille voler de ses propres ailes et tant pis si elle se les brûlent. Ça lui fait une expérience et ce n'est pas dans ce village en zone rurale qu'elle en vivra.