Même la pluie par Missbale974

Il y a des films qui laissent une telle impression sur vous que vous ne savez pas par où commencer et décrire avec justesse ce que vous avez ressenti.La tâche qui m'incombe aujourd'hui est ardue car j'ai pris avec ce film une claque monumentale du début à la fin.Tout était parfait:les acteurs,l'histoire,les paysages,l'émotion....etc.Voilà un film qui mériterait l'appellation film de l'année et ce, à juste titre.
Le procédé de mettre un film dans un film,est très intéressant puisqu'il permet de voir les conditions extrêmes,les exigences,les contraintes qu'entrainent un tournage.Mais bien plus que çà,la mise en abyme se retrouve particulièrement audacieuse et sert au film.En effet,le tournage de Sebastian trouve écho dans la vie réelle des figurants,de sorte que réalité et fiction se rejoignent,il n'y a plus vraiment de distinction à un moment donné.On se rend compte que malgré la différence d'époque,les inégalités persistent et que la supériorité des blancs,du pouvoir mis en place est toujours d'actualité.Dans le film que Sebastian tourne,Christophe Colomb arrive en Amérique Latine et exploite les Indiens mais un prête s'insurge contre lui.Dans la réalité,ces mêmes Indiens se révoltent car le gouvernement veut privatiser l'eau.Deux époques distinctes et pourtant, même combat pour les Indiens.
Au cœur de toutes ces problématiques,trois hommes livrent bataille chacun à leur niveau .A commencer par Sebastian le scénariste du film,qui est obnubilé par ce prête qui a défendu la cause indienne.Si au début il se montrait sensible aux problèmes des indiens,son intention véritable se révèle très vite aux yeux du spectateur:réaliser son film à tout prix quel qu'en soit le prix:financier ou physique d'ailleurs.Son personnage est très ambivalent,d'un côté on le sent tiraillé par la cause indienne et d'un autre côté,faire ce film semble prendre le dessus comme si c'était une histoire de survie pour lui.Vient ensuite Costa qui est le personnage le plus complexe,le plus attachant.Il est le producteur du film et semble aux premiers abords,ne s'intéressait qu'au fric.Cependant derrière les apparences trompeuses,se cache un homme blessé,qui ne veut plus rien ressentir de peur de souffrir à nouveau.Pourtant,lui qui croyait ne rien à avoir à gagner à part l'argent,il va avoir une véritable révélation au contact d'un des boliviens,David.Ce dernier est un personnage très important puisqu'il représente la cause indienne à la fois dans le film Même la pluie et celui que Sebastian tourne.Dans les deux cas,il incarne la révolution,le militantisme contre les détenteurs du pouvoir luttant ainsi pour la démocratie,la justice.Au contact de Costa,ses préjugés vont être remis en cause car en plus de se révéler un ami,Costa va se battre pour lui quitte à mettre sa propre vie en péril.Par ailleurs,le film dénonce un certain mal être des personnages et pas chez ceux à qui on pourrait s'attendre.Les personnages semblent déconnecter de la réalité qui les entoure mais le spectateur est séduit par leur humanité,leur caractère imparfait comme celui qui incarne Christophe Colomb,il se sent mal dans sa peau et tente de l'oublier en noyant son chagrin dans l'alcool/Costa a un enfant qu'il ne voit plus depuis quelques années déjà,il est seul/Pour Sebastian,son film est toute sa vie,il n'y a que lui qui compte..Peut-être est-ce l'illustration parfaite que l'argent ne rend pas heureux car Daniel et ses amis vivent modestement voir dans la pauvreté et pourtant ils ont une joie de vivre,un courage exemplaire et une volonté de réussir indestructible.La psychologie des personnages est finement travaillé ,le réalisateur n'hésite pas à les pousser dans leurs propres contradictions,faiblesses.Je pense notamment à un passage où Sebastian et Costa sont avec le maire,les deux amis critiquent le politicien sur les conditions dans lesquelles il traite son peuple.Ce dernier n'hésite pas à déclarer aux deux hommes qu'ils devraient commencer par montrer l'exemple en augmentant le salaire(3 dollars)des figurants.Les deux amis restent sans voix et ne peuvent qu'acquiescer sans pour autant faire quoique ce soit pour réellement changer les choses.
Même la pluie séduit aussi par la splendeur des paysages boliviens mais plus encore pour son message:il faut toujours se battre pour ce qu'on croit juste qu'importe le prix et même si cela peut paraitre sans issue ou une cause perdue.D'autant plus quand on sait que le film s'inspire de faits réels qui se sont déroulés en 2000 à Cochabamba (ville en Bolivie).En effet,le peuple s'était révolté contre les pouvoirs publics à la suite de la privatisation de l'eau.Une véritable « guerre » a été déclarée entre les représentants de l'ordre et les habitants,l'état d'urgence a même été déclaré par le président.Mais,le peuble a tenu bon de sorte que l'eau est retombée dans le domaine public.Impossible donc de rester indifférente à ce film portés par des acteurs formidables.Mention spéciale pour l'acteur Luis Tosar qui nous trouble tout d'abord avec son regard impénétrable puis par son jeu d'exception.N'oublions pas l'excellente maitrise d'Iciar Bollian,le scénario sans faille et surtout l'émotion qui nous gagne à chaque seconde du film.