Même la pluie, ou le présage confirmé d'un film qui en a grave dans les tripes. Sous peine de tomber sous le coup de faucille des alter-mondialistes remués dans leur fibre Chiapa-sympathique, je ne peux décemment pas tacler la trame de fond, comprendre les opprimés de ce monde mercantile de merde. Mais il reste de quoi se mettre sous la dent.
Certes servi par une lumière utilisée à bon escient, le film laisse entrevoir quelques scènes d'une rare force ésotérique, tel le sacrifice des indigènes par les compères de Christophe Colomb. Leurs incantations mêlées aux brumes morbides des bûchers imprègnent un mysticisme puissant, qui fait écho au surprenant Mission de Roland Joffé. Bien qu'un brin caricaturale sur la fin, l'interprétation grave de Daniel/Hatuey [Carlos Aduviri] y joue pour beaucoup. Pour autant, le rythme brûlant du tournage est trop souvent saboté par des gloses sans fin (cf. diatribe de Colón à table, larmes puériles de Gael Garcia Bernal qui, décidément, n'a de touchant que son nanisme).
Et puis, Même la pluie, il y a quand même trop de clapotis dedans. Trentième minute, on fait péter le piano à queue. Une heure, c'est l'heure d'être sur-émouvu dans son for intérieur, alors Alberto envoie les violons à fond les ballons. Clôture, je n'en puis plus, hésitant à nous soutirer, moi et mon coeur de pierre, aux flux bruyants d'un public conquis. Un jour, je me lancerai dans une introspection sur le pourquoi des flonflons qui ne m'arrachent pas le moindre hoquet. Je dois être un monstre, et qui s'est fait chier, en plus.