Première partie du diptyque concernant la bataille d'Iwo Jima (février 1945) pendant la deuxième guerre mondiale dans le Pacifique. Ce film est réalisé par Clint Eastwood et co-produit par Spielberg.
D'un point de vue historique, cette île étant terre japonaise était solidement défendue par des troupes quasiment enterrées. Ce fut donc un joyeux massacre (environ 7000 morts côté US et 20000 morts côté japonais) que de prendre d'assaut cette île. Lorsque le (premier) piton rocheux fut pris par les américains, un drapeau fut hissé et pris en photo. Le haut management américain (au sens large) s'empara de ce symbole pour l'instrumentaliser afin de lever des fonds de contribution à l'effort de guerre. C'est cet évènement qui semble avoir une base historique qui est l'objet du film. En effet, trois des soldats dont un amérindien ayant levé le drapeau participèrent à une tournée triomphale à travers les USA.
Clint Eastwood mène à travers ce film une plus large réflexion sur la notion d'héroïsme. Le seul héros n'est-il pas celui qui est mort pour que survive le copain ? Les trois soldats qui participent à cette tournée, sortis de cet enfer, s'interrogent sur leur légitimité au titre de héros d'autant que la vraie réalité ne semble pas si simple. Il y eut deux "levées de drapeau", une sous le feu, l'autre un peu plus orchestrée et faisant l'objet de la fameuse photographie. Et nos trois soldats rescapés n'ont participé qu'à la deuxième levée…
Une autre réflexion intéressante concerne l'importance d'une photographie de guerre et oppose celle d'Iwo Jima, symbole de victoire, à d'autres photos prises pendant la guerre du Vietnam, bien plus négatives et critiques, préfigurant la défaite. Honnêtement, je ne suis pas spécialiste mais penserais qu'il doit y avoir autant de contre-exemples démontrant le contraire. En revanche, je veux bien accorder une notion de guerre juste ancrée dans les esprits pour la guerre contre les forces de l'Axe alors que la guerre du Vietnam était beaucoup injustifiable et injustifiée. Les photos me semblent alors n'être qu'une conséquence induite.
L'autre point intéressant développé par Clint Eastwood est de s'être intéressé au devenir de ces trois soldats après la guerre. Le soldat amérindien, écœuré par cette instrumentalisation et surtout par son sentiment de culpabilité vis-à-vis d'un autre soldat tombé, plonge dans l'alcoolisme et finira mal. Les deux autres finiront par tomber peu à peu dans l'oubli. Aucun ne saura rebondir et en profiter pour se faire une situation après-guerre. Mieux, un des trois soldats qui fondera une famille n'en parlera jamais. Son fils ne découvrira cette histoire de drapeau qu'après sa mort. C'est probablement celui qui aura eu la vie la plus heureuse.
Côté casting, je connais très peu d'acteurs à part Adam Beach qui joue le rôle d'Ira, le soldat indien et que j'avais déjà vu dans le film "Windtalkers" de John Woo. Dans l'ensemble, les acteurs jouent avec une grande conviction qu'il s'agisse des soldats ou des hommes politiques chargés d'orchestrer la tournée dont on sent parfois un racisme un peu latent et vraisemblable pour ce qui concerne l'accueil et, ma foi, autant le dire, l'acceptabilité du soldat amérindien.
Les scènes de guerre sont remarquablement tournées avec réalisme et une grande visibilité.
Non, le petit reproche que je ferais au film, c'est l'aspect un peu brouillon qui fait passer le film par plusieurs époques et pour chacun des soldats (dont l'aspect physique a évidemment changé) rendant le film parfois difficile à suivre.
Au final, "mémoires de nos pères" est un bon film qui pose de bonnes questions sur la réalité de l'héroïsme en temps de guerre et dont un des soldats relativise bien la portée patriotique :
"je ne supporte pas qu’on me considère comme un héros, tout ce que j’ai fait, c’est essayer de ne pas me faire tuer".
Deuxième partie du diptyque très bientôt …