Sévices sexuels, racket, harcèlement, fanatisme religieux, intolérance, deuil,... Mémoires d'un escargot semble dresser un tableau exhaustif des plus probantes joyeusetés de la condition humaine. Dans un geste semblable à celui déjà opéré avec le superbe Mary and Max, Adam Elliot construit le parcours de son personnage central comme un gigantesque (et faussement désespéré) chemin de croix.
Il lui permet de croquer et dénoncer avec un cynisme - qui ne bascule jamais dans le nihilisme gratuit - ravageur les tares les plus ignobles de nos sociétés contemporaines. C'est dans cette optique que le recours au stop-motion s'avère des plus pertinents. Ces décors et personnages de pâte à modeler représentent paradoxalement un quotidien réaliste, tout en offrant un recul suffisant et nécessaire au visionnage par leur nature de figurines cousues main. Il va de soi que le récit, mis en image en prises de vue réelles, aurait été taxé de bassement misérabiliste ou de complaisance sordide.
C'est à sa maîtrise de l'animation en volume que l'on doit intégralement la réussite de ce nouveau joyau d'Elliot, d'une hallucinante audace dans son exposition éprouvante, crue et souvent cruelle, mais en conséquence éminemment cathartique et salvatrice, de vices humanitaires encore trop souvent laissés sous le tapis. La conclusion, lumineuse, récompensera d'ailleurs les spectateurs les plus zélés.