Memory
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Memory

Film de Michel Franco (2023)

C'est un film qui n'échappe pas aux grands sujets de l'époque : ici Sylvia, femme alcoolique, a été (ou se dit) traumatisée dans son enfance par le viol collectif de ses camarades de classe dont elle croit reconnaître un des participants dans Saul, un homme qui souffre de démence et d'amnésie.


Seulement, on se rend compte au cours du film que Sylvia a accusé à tort Saul et que ce traumatisme en cache un autre beaucoup plus profond et originel.


On est tout étonné au premier abord par la surcharge de pathos que Franco met dans son scénario : femme alcoolique, traumatisée, dépressive, alitée dans un appart sombre, lui, à moitié fou et tout le temps en robe de chambre. Les couleurs très froides du film finissant par alourdir l'ensemble.

Mais tout cela n'est évidemment qu'un prétexte pour faire ressortir la pureté de leur relation emplie de tendresse et de bienveillance. Jessica Chastain n'aura jamais été aussi belle qu'en jouant ce personnage fragile qui finit peu à peu par s'ouvrir à nouveau à l'homme.


Car c'est bien de l'homme qu'il s'agit et pas d'un homme et c'est en ce sens que Memory est un film qui traite des sujets de notre époque. A travers cette histoire d'amour entre un homme et une femme traumatisée par un viol, c'est la réconciliation des deux genres que Michel Franco met en scène.


Saul a donc ici une double portée : il est la catharsis par laquelle Sylvia s'ouvre à nouveau au monde, et la maïeutique par laquelle elle finit par accoucher de son traumatisme le plus profond. Ainsi se joue une dialectique entre l'extérieur et l'intérieur, entre la surface et les profondeurs .

On notera par exemple que Sylvia est un personnage qui se barricade (appart très sombre, alarme, toujours en manteau même quand elle est chez les gens) tandis que Saul est celui, au contraire, qui tente (inconsciemment ou non) de s'échapper de son intérieur.


Au final, si Sylvia renait par l'intermédiaire de Saul, amnésique, c'est qu'il lui fait prendre conscience comme Nietzsche que l'oubli est une condition pour vivre.




Gahisto
8
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le 11 juin 2024

Critique lue 12 fois

Gahisto

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