Merlusse
7.2
Merlusse

Film de Marcel Pagnol (1935)

Suivant le chemin inverse d’Alexander Payne, son récent et excellent Winter Break m’a amené à Merlusse.

Il est indéniable que le cinéaste Américain s’en inspire grandement, en reprenant : la structure du film, sorte de conte de Noël et fable humaniste ; le personnage principal, d’un côté le professeur d’histoire antique, de l’autre le pion, tous les deux seuls, sans famille, de modeste condition, ayant un problème oculaire (borgne / strabisme), hommes droits aux valeurs solides, franchement antipathiques, victimes des moqueries collectives, acariâtres mais au fond au grand cœur; les enfants, jeunes et plus mûrs, abandonnés par des parents peu enviables ; le mélange du familial et du scolaire, avec la figure paternel du référent de l’autorité ; l’intrusion du politique dans le scolaire et l’hypocrisie de l’Homme, à travers le personnage du proviseur et du censeur.

Pour en revenir à Merlusse plus précisément, Pagnol nous prévient d’emblée que le film souffre d’une technique assez limitée, en raison du manque des progrès de l’époque en la matière – ce qui lui permet de se dédouaner de sa propre méconnaissance, ou tout du moins de sa connaissance assez modeste, du genre cinématographique, 3 ans à peine après avoir tourné son premier long-métrage, et 5 ans avant la sortie de La femme du boulanger. L’aspect général du film rappelle le théâtre, avec des dialogues filmés, écrits avec la belle prose provençale de Pagnol. Néanmoins, le film est tourné dans des décors réels (le lycée Thiers de Marseille), ce qui permet à la caméra et au touchant Henri Poupon de déambuler par les cours, les classes et les couloirs, et d’extérioriser le récit ; par ailleurs, la scène du fondu qui établit le parallélisme école / famille (avec la tablée familiale au bout de laquelle se trouve le patriarche et le personnage central du pion le soir du réveillon de Noël) démontre une maîtrise naissante de la technique.

Avec un argument touchant, des interprètes jeunes, naturels et authentiques, Pagnol nous raconte une histoire adorable et humaine pleine de bienfaisante tendresse.


Marlon_B
7
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur.

Créée

le 28 juil. 2024

Critique lue 4 fois

Marlon_B

Écrit par

Critique lue 4 fois

D'autres avis sur Merlusse

Merlusse
Boubakar
7

Sale gueule, mais coeur d'or.

C'est un moyen-métrage qui raconte la difficile cohabitation entre des élèves à l'internat et un professeur (dit Merlusse) qui est non seulement moche, mais qui ne leur parait pas sympathique pour un...

le 6 janv. 2013

6 j'aime

1

Merlusse
etiosoko
6

Pion, élèves et apparences

Adversaires en apparence, les élèves du collège de Marseille dépeignent celui qu’ils surnomment Merlusse - Morue -, et qui leur inspire tant d’antipathie, comme un malfaisant prof laid, sévère et...

le 30 mai 2018

3 j'aime

Merlusse
Morrinson
5

Vieille école

Étrange expérience de tomber sur le film de Marcel Pagnol qui pourrait bien être la version originale du récent "Winter Break" (The Holdovers) et qui serait en tous cas la source d'inspiration...

le 9 juil. 2024

1 j'aime

Du même critique

Call Me by Your Name
Marlon_B
5

Statue grecque bipède

Reconnaissons d'abord le mérite de Luca Guadagnino qui réussit à créer une ambiance - ce qui n'est pas aussi aisé qu'il ne le paraît - faite de nonchalance estivale, de moiteur sensuelle des corps et...

le 17 janv. 2018

30 j'aime

1

Lady Bird
Marlon_B
5

Girly, cheesy mais indie

Comédie romantique de ciné indé, au ton décalé, assez girly, un peu cheesy, pour grands enfants plutôt que pour adultes, bien américaine, séduisante grâce à ses acteurs (Saoirse Ronan est très...

le 18 janv. 2018

26 j'aime

2

Vitalina Varela
Marlon_B
4

Expérimental

Pedro Costa soulève l'éternel débat artistique opposant les précurseurs de la forme pure, esthètes radicaux comme purent l'être à titre d'exemple Mallarmé en poésie, Mondrian en peinture, Schönberg...

le 25 mars 2020

11 j'aime

11