Nancy a la soixantaine, veuve depuis plusieurs mois. Nancy est à la retraite et a deux grands enfants. Nancy a vécu une vie trop sage avec son mari, sans saveur, sans excès, sans orgasme aussi, jamais. Alors Nancy, soudain, a envie d’un peu de folie. D’un peu d’aventure. Pour ça, Nancy décide de s’offrir les services d’un jeune escort boy. Ce sera Léo Grande, beau gosse évidemment, charmant et doux. Nancy est d’abord intimidée, et par lui, et par ce qu’elle s’autorise avec lui. Mais de leurs rendez-vous va naître, pour chacun, une nouvelle compréhension de l’existence. Une sorte de lâcher prise qui leur permettra de surmonter ce qui les empêche. Du moins de faire avec, de faire au mieux.
Sur des thèmes tendance casse-gueule (prostitution, désir et fantasme féminins, sexualité du troisième âge), Mes rendez-vous avec Léo parvient pourtant à associer humour élégant et étude de mœurs jamais plombante. Mais le film de Sophie Hyde se concentre surtout, à travers le rapprochement et les différences de ses deux personnages, à observer, à dire une libération du corps. Car pour Nancy, sa rencontre avec Léo est davantage qu’une parenthèse dans sa vie, que quelques heures de bon temps. C’est, tout à coup, pouvoir redécouvrir son corps. Réapprendre le plaisir. Faire fi des préjugés, des représentations sociales et des canons imposés par l’époque (perfection, perfection, perfection) où la vieillesse se doit d’être escamotée. Comme si on en avait honte, ou comme si on en avait peur.
Le film en revanche est beaucoup moins pertinent (et moins touchant) quand il se lance, dans son dernier tiers, dans une espèce d’analyse psychologique peu inspirée (Léo et sa violente rupture avec sa mère), délaissant alors la belle simplicité qui s’exprimait dans l’interaction entre les multiples questionnements de Nancy (son mariage, son corps, ses relations avec ses enfants…) et l’assurance réconfortante de Léo. Film de chambre (d’hôtel) ne souffrant jamais de son aspect théâtral, Mes rendez-vous avec Léo repose en grande partie (mais pas que) sur la remarquable prestation de ses deux interprètes : Daryl McCormack, remarqué dans la série Peaky blinders, est ici tout en finesse et en séduction, tandis qu’Emma Thompson, royale, rare, radieuse, ose le nu frontal dans un dernier plan magnifique résonnant comme l’émancipation, tardive mais superbe, de tout son être.
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