Sean Ellis s’est fait connaître d’un assez large public avec le plutôt réussi Cashback en 2006, puis beaucoup moins avec Broken en 2008, sauvé en entier par Lena Headey que les amateurs de Game of thrones connaissent bien désormais (Cersei Lannister, c’est elle). Tout ça pour dire que son nouveau film, Metro Manila, ne risque pas vraiment d’inverser cette tendance descendante parce qu’Ellis, à travers l’histoire de ce père cherchant à sauver sa famille de la misère, accumule les poncifs et les tares d’un misérabilisme gonflé aux hormones de l’hyperbole ; ce surplus de manichéisme finit d’ailleurs par annihiler toute tentative de discours emblématique (vision davantage occidentalisée, fignolée, du délabrement social d’un pays), d’empathie et d’éventuel suspens narratif.
En prenant, comme figure centrale de son film, une famille martyr qui ne fait jamais tache (la petite fille est gentille comme tout et sauve les chatons des méchants petits garçons, la mère est belle et digne même en string derrière une vitre, le père est honnête et limite benêt, plus le bébé pleurnichard pour en rajouter dans le pathos déjà bien chargé), Ellis se complaît dans une espèce de manifeste naïf cherchant à rapporter et à dénoncer, de façon artificielle, les prurits de notre monde. Une famille dont on arrive presque à souhaiter tous les malheurs de la Terre tant les personnages sont énervants de simplisme béat et d’innocence caricaturale.
Sûr de son coup, Ellis balance sa smala sacrificielle de paysans ruinés, pure et douce comme l’agneau qui vient de naître, dans un vertige de stupre, de corruption et de violence, mais sans trouver le juste équilibre idéologique et scénaristique (même la partie thriller est ratée, jamais prenante, jamais sous tension). Son film en devient rapidement agaçant, épuisant de moralisme niais (face au désespoir, il n’y a que des actes désespérés, merci pour le tuyau) et qui, pire, laisse complètement indifférent face à la détresse existentielle de cette famille modèle. Ellis parvient, certes, à parfaitement capter l’ambiance grouillante, puante et chaude, de Manille, enfer urbain impressionnant d’humanité crasse, et puis l’image est belle, la réalisation nerveuse, parfois sensorielle, mais ces quelques éclats s’abîment dans une incessante démagogie tape-à-l’œil qui ennuie et fait demander grâce.
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