"What else brings whites to Harlem but business?"

Ce polar à la lisière de la blaxploitation (pas assez funky et positivement grotesque pour pouvoir réellement y prétendre) est une étonnante variation empruntant les rues sales de New York dans les années 70, décidément bien éloignée de la ville que l'on connaît aujourd'hui. On se croirait pendant tout le film dans les bas-fonds d'une ville oubliée... Cette évolution me sidère toujours autant, quand on compare cet imaginaire d'il y a 40-50 ans à celui de NY aujourd'hui.


Hors sujet : quel dommage que ce ne soit pas la version populaire du morceau éponyme de Bobby Womack présente dans la bande originale !


Ces préliminaires mis de côté, Across 110th Street est tout entier dévolu à la fuite (ou à la chasse à l'homme, selon le point de vue adopté, ce dernier changeant régulièrement) de trois malfrats qui ont eu l'audace autant que la bêtise ou la malchance de braquer les mauvaises personnes. Trois gars de Harlem qui flinguent les gros poissons de la mafia italienne en voulant dérober une somme astronomique d'argent, et des flics au passage, en s'échappant, histoire de corser l'addition. Bilan de l'opération : 300 000 dollars et la moitié de la ville à leurs trousses, d'un côté la police bouillonnante et de l'autre des mafieux marqués au fer rouge. On n'envie pas leur place, à ces trois-là...


J'apprécie énormément la peinture de ce Harlem 70s, dans toute sa crasse, sa misère, ses caïds. C'est bien crado. Côté flicaille, il y a Anthony Quinn en capitaine raciste sur les bords, misanthrope et largement corrompu, qui doit collaborer de force avec Yaphet Kotto, mais on est bien loin des stéréotypes qui lorgnent sur la dimension comique de cette association : ils passeront 1h40 à s'engueuler vertement, toujours à la limite de la baston. Globalement tous les acteurs sont vraiment très efficaces dans leurs rôles et véhiculent une ambiance toute particulière, qui permet à mes yeux de passer outre des éléments de scénario un peu faiblards. Antonio Fargas, toujours aussi remarquable par sa présence — son visage surtout.


La force d'un tel film passe par la fluidité avec laquelle il développe ses atmosphères, et l'articulation de l'ensemble qui fait défiler toute la pellicule en un seul grand mouvement, nerveux, tendu, sordide. La course contre la montre engagée entre la police et la mafia est assez intéressante, pas trop redondante, elle prend à la gorge très vite. Dommage qu'on ait le sentiment que le final soit un peu bâclé, car l'ambiance poisseuse et la tension raciale étaient d'une efficacité redoutable.


http://www.je-mattarde.com/index.php?post/Meurtres-dans-la-110e-Rue-de-Barry-Shear-1972

Morrinson
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le 9 oct. 2022

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Morrinson

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