(spoilers, j'imagine, si vous ne voyez pas le scénario d'un film pareil venir à des années lumières)
Faire un film tristoune sur maman qui en train de clamser, c'est convenu et fastoche. Montrer la litanie des chambres d’hôpital qui sentent la mort, des médecins qui se perdent dans les euphémismes, des familles au chevet qui savent pas trop quoi faire, évidemment que ça parle à tout le monde, évidemment que ça fait poindre de l'émotion. Maman est malade, maman a mal, maman devient un peu folle, maman voudrait rentrer dans son appartement qui est vide maintenant. Et alors ? Elle vaut quoi cette émotion ? Elle surgit au milieu du film sans vraiment vivre avec nous, elle file des pots-de-vins à notre mémoire pour mieux lui faire cracher les larmes, amenant dans son sac des dialogues éculés et des situations cartographiées. Y'a même des choses vraiment révoltantes en cours de chemin comme cette séquence où la réalisatrice va à l’hôpital pour trouver la chambre de sa mère vide. comme on a eu auparavant plusieurs séquences de rêves, on s'imagine dans un cauchemar. elle parle aux médecins, aux patients : "VOUS N'AVEZ PAS VU MA MÈRE?". puis, finalement, coupure : sa mère a été transférée dans un autre service. Son frère, qui lui téléphone pourtant sans arrêt, est à son chevet mais ne l'a pas prévenu cette fois-ci, va savoir. Un peu comme dans Amour, on est face au pur film d'horreur gériatrique : morte? pas morte? suspense dégueulasse. c'est pas pour cette fois, respirez un peu.
Et puis à côté de ça, y'a le reste, qui parle de cinéma. C'est vaguement drôle, avec un Turturro qui cabotine, et ça s'insère assez maladroitement dans le machin avec un peu de "la vie continue et ça fait mal un peu mais bon ça continue quand même alors va bien falloir continuer aussi", saupoudré dessus. Y'a aussi ces séquences de rêves, parfois belles, qui sont sans doute le meilleur du film (celui du cinéma de nuit est admirable, même si j'aurais rêvé que Moretti la pousse peut-être encore un peu plus loin). En fin de compte, ce que je reproche à Mia Madre, c'est de n'avoir rien fait surgir en moi que le regret de films qui me sont chers. Si j'ai envie de voir une maman qui meurt, je regarde La Gueule Ouverte. Si j'ai envie de voir les affres de la machine cinématographique, je regarde La Nuit Américaine. Mia Madre me semble être une terrible stagnation, désespérément grisâtre et pataude (j'imagine que ça sied au ton du film mais BON DIEU, qu'est ce que c'est GRIS). Je sais pas. Non merci.