« Mia Madre » est une triple réussite. Par sa mise en abyme du cinéma, il apporte un témoignage sans fard sur les réalités du métier de metteur en scène, par lequel on compose avec des acteurs irascibles, des subalternes exagérément soumis et des aléas sur lesquels on n’a aucune prise. Par son approche de la relation mère/fille, il dit beaucoup sur son auteur et, plus généralement, sur ces personnes tellement importantes qu’elles sont des points d’accroche presque indispensables. Par les parallèles entre frère et sœur, il déconstruit la personnalité humaine, la capacité de faire face aux épreuves, celle du rebond.
Il est inutile de revenir sur les qualités de l’actrice principale : elle crève littéralement l’écran. Turturro est quant à lui fidèle à lui-même, c’est-à-dire investi par son rôle jusqu’à l’outrance. Son personnage, bien que secondaire, donne tout son piment au film : il apparaît comme une star caractérielle, mythomane sur les bords, dont le talent semble au mieux contestable. La relation tumultueuse qui le lie à la réalisatrice qui l’emploie apporte quelques moments de pure dérision. Et permet d’éclairer la crise que traverse cette mère de famille-cinéaste confrontée à différents types de problèmes.
S’il ne brille pas forcément sur un plan strictement formel, « Mia Madre » le fait ailleurs : ses personnages sont fouillés, écrits avec beaucoup d’à-propos, et les intrigues s’enlacent pour mieux mettre en avant les ruptures qui rythment leur quotidien. C’est justement dans cette sensibilité que Moretti s’en sort le mieux, avec toujours ce thème de la mort qui vient hanter son cinéma.