Avec ses lunettes, sa clope au bec, ses cheveux longs à la Jim Morrison, et un faux air de Kurt Russell - jeune, période "Le roman d'Elvis", il y a déjà quelque chose qui ne passe pas. Je ne le sens pas, mais je ne sais pas pourquoi : ça sent bon la recette épicée, l'exotisme turc bon marché, le film d'une génération que tout le monde s'est bouffé, jusqu'à en connaître les scènes jusqu'au bout des doigts, le truc immanquable, que t'es obligé d'aimer sinon t'es naze. Et bien ça n'a pas loupé, une collègue de boulot m'a dit "ah ouais tu n'as toujours pas vu Midnight Express?" : sa réaction m'a incroyablement énervé, j'étais alors, sans le savoir, malgré moi, dans une position de contradiction et me suis presque dit : "je vais le démonter votre film culte".
Mais quand ma collègue de boulot m'a dit ça, c'était lundi. Pendant la semaine, j'ai oublié la raison de mon agacement. Et hier soir, quand j'ai inséré le DVD dans le lecteur, j'ai laissé coulé. Je me suis laissé embarqué, mais très vite, j'ai constaté que ça ne marchait pas. Je pense que ce truc à très mal vieilli c'est tout. Evidemment, on est un peu dans les années 80, et la musique de Giorgo Moroder c'est juste pas possible. Alors ok, je me coucherai quand même moins con ce soir, parce que j'ai enfin mis un nom d'auteur derrière ce thème musical hyper entêtant ("The Chase") que j'ai entendu mille fois avant la diffusion des films dans les salles de cinéma, mais des airs de synthétiseur sirupeux post - rock progressif dès fois, c'est dur à avaler.
Je sens bien que c'est un film solide, cohérent, assez racé même. Et puis il y a John Hurt. La simple évocation de son nom est suffisante pour te convaincre que le film est bien. La section de la prison faite pour les fous à quelque chose de l'asile dans lequel se fait interner le héros de l'échelle de Jacob. Et là-dessus, c'est plutôt réussi. Dans l'ensemble, plusieurs aspects des conditions carcérales me semblent très réalistes. La folie grandissante, les troubles psychologiques apparents, la montée de la frustration, l'explosion de la colère, tout cela est très bien amené. Alors qu'est ce qui ne passe pas bon sang?
Des fois, il faut s'arrêter de chercher ce qui cloche. La réponse est devant les yeux, comme une évidence qu'on n'a pas envie d'admettre parce qu'on se force à aimer un film qu'on n'aime pas.
C'est l'acteur qui ne passe pas en fait.
Il me fait penser à Treat Williams, et à Kurt Russel aussi, mais en plus gouailleur. Il a comme une sorte de strabisme qui me coince dans la gorge, quelque chose de pas très glamour. Il est de ce genre d'acteur qui a du pot sur un film, parce que le réalisateur lui a fait confiance et puis c'est tout. Sauf que la suite n'est pas convaincante. C'est un peu comme Ray Liotta en fait. Donc c'est l'acteur qui me fait grincer des dents, et à chaque fois qu'il parle en plus : sa voix aiguë et nasillarde ne m'aide pas à faire passer la pilule, et quand la scène culte arrive, qu'il pète son câble, qu'il vocifère, qu'il hurle, éructe tout ce qu'il peut, et qu'il détruit tout sur son passage (SPOIL), ça ne prend pas. C'est trop fort, surjoué. Disproportionné. Un moment de grâce dans une partition mal interprétée.
La possible homosexualité du héros aurait amené un peu de beurre dans les épinards, mais la façon dont l'idée est amenée, avec (encore) cette musique, finit par lasser, et pour finir tombe à plat comme un soufflé. C'est juste évoqué, c'est tout. Ce n'est pas creusé, pas développé. C'est quoi l'idée? En prison, on est sujet à toute sorte d'expériences et on se laisse aller à toutes sortes d'ouvertures? En prison, on révelle ce qui est refoulé? Je veux bien, mais il fallait aller plus loin.
Et quand il retrouve sa petite amie... Et que celle-ci dévoile sa poitrine, disons, quelque peu ingrate... je me suis demandé quand est-ce que tout ce cirque et cette folie allaient s'arrêter.
Je n'ai pas aimé. Je suis naze. Mais bon, cette évaluation appelle à un second visionnage. Et en version française en plus. Si je peux éviter d'entendre la voix de Brad Davis, ça m'aidera peut-être à changer ma note d'un ou deux point(s).
Il y a des jours comme ça.