Premier grand film des frères Coen, après le très bon Sang pour Sang puis le sympathique mais relativement anecdotique Arizona Junior, Miller's Crossing nous dépeint une galerie de gangsters (quelques personnages seulement ne faisant que graviter autour d'eux, dont des flics, et encore...) décalés, voire loufoques pour certains, à l'humour noir et aux répliques cinglantes de dialoguistes Audiardisants.
Et heureusement ! Parce que le début du film se basant quasi exclusivement sur les dialogues, il en fallait de très bons pour ne pas décourager le spectateur lambda d'aller au-delà... D'autant qu'il serait impardonnable de passer à côté de la montée en puissance du scénario aussi complexe que brillant concocté par les frangins américains.
La mise en scène, déjà maîtrisée pour leur troisième film, augure quant à elle, et le mieux du monde, une carrière de duettistes des plus glorieuses, avec notamment ce joli moment de poésie où s'envole vers l'horizon le chapeau de l'un de nos terribles gangsters. Au premier plan incarnés par le flegmatique Gabriel Byrne, assez flippant de sang-froid, associé à un Jon Polito des plus farfelus, ou encore à l'immense John Turturro, implorant de vices.
Sous le chapeau nous avons donc affaire à une histoire de trahisons à l'ère de la prohibition, bourrée de rebondissements et de chairs ensanglantées. Et si celle-ci a peut-être un peu de mal à s'installer, par excès discursif pendant un gros premier quart d'heure, rien ne l'empêche toutefois d'atteindre des sommets au fur et à mesure que l'on cerne mieux tous les personnages et que s'enchaînent des scènes toutes plus mémorables les unes que les autres (rdv dans l'entrepôt après la famille, scènes de mitraillages, les sous-bois, les retrouvailles avec Bernie, le danois, etc.).
Que Dieu les bénisse ! (même ceux qui n'ont pas de coeur...)
8,5/10