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Second long-métrage d’Arthur Penn après Le Gaucher, The Miracle Worker, qu’il a déjà mis en scène à Broadway, nous fait suivre la vie d'une couple qui a de plus en plus de mal à maîtriser et à élever...
le 1 juin 2014
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The Miracle Worker pourrait bien être l'un des grands précurseurs du Nouvel Hollywood tant il déroge aux codes hollywoodiens de l'époque dernière, Arthur Penn usant de ses effets de style à tout va, faisant durer les séquences comme brisant les règles du montage traditionnel à l'occasion de surimpressions absolument sublimes. Idéologiquement, l'action se déroule au lendemain de la guerre de Sécession en Alabama, et il s'agira de décortiquer le résultat d'une éducation sudiste, conservatrice, somme toute incapable de "soigner" la jeune Helen.
Inconfortable donc, le long-métrage de Penn ne cesse d'être ambigu sur le modèle d'éducation idéal, tel que celui que la belle famille américaine devrait suivre. Imposer des règles et les soumettre à l'incontrôlable jeune fille comme première étape, puis lui autoriser à découvrir le mensonge ensuite, qu'elle puisse savoir qu'elle ne doit pas toujours dire oui à tout. C'est un combat intégral pour l'éducatrice, d'ailleurs inspiré d'une histoire vraie, voyant en cette fille l'espoir qu'elle n'a pu être plus jeune dans un centre d'aide, faute d'une attention nécessaire.
Apprendre la punition, puis les mots pour la découverte des sens, c'est un travail douloureux pour l'enfant comme l'adulte, mais nécessaire puisque fédérateur pour la vie. Annie semble être l'ange déchu, portant ses lunettes tel un voile pour cacher son regard triste, n'ayant pu connaître l'amour et la parenté plus jeune. Penn jouera sur cette dualité parentale, quitte à imposer Annie en fin de film telle une mère de substitution, à l'inverse de la première séquence où elle était complètement absente. Elle lui dira, qu'elle l'apprécie, non pas qu'elle l'aime.
Le désir d'être reconnu tel un parent ou un enfant semble être nécessaire pour les deux parents, comme pour mieux asseoir les valeur et codes sociaux. Certes, il ne s'agit pas de remettre en question l'amour que les deux parents porte à leur fille mais la question de l'appartenance, ancrée sur toute une culture américaine. Etre présent à la table nécessite d'être propre physiquement, sans être forcément sain, et de ne pas comporter comme un animal. A défaut de se soucier de la santé de leur fille, les deux parents pensent en premier lieu, à l'image que renvoie cette fille, cette famille au regard du monde qu'ils ont établi.
Paradoxal, le film l'est à bien des égards. Si la générosité et la compassion ne seraient pas suffisants pour éduquer convenablement Helen, que faudrait-il ? De la rigueur, sévérité et le nécessaire de tout individu : c'est l'apprentissage d'un combat, que chacun doit mener sur sa vie, contraire à un embourgeoisement où toutes les clés sont déposées sur la table à la naissance. Il est dit à un moment du long-métrage qu'Helen ne souhaiterait peut-être pas avoir les yeux qu'Annie souhaite apercevoir, mais on l'aura bien compris, la personnalité d'un individu n'est pas nécessairement héréditaire. La jeune fille apprend en même temps qu'elle découvre les sens et le monde qui l'entoure, et finit par apprécier la valeur des choses simples.
Rappelant parfois le style de l'expressionnisme notamment pour la scène de rêve, le film dispose également d'une scène de confrontation entre l'éducatrice et la jeune fille absolument saisissante, contrastant avec la dernière scène où Helen accomplira le miracle, donnant vie aux choses qui l'entoure (non plus considérées comme déjà acquises) par la voix. Le final, d'une pureté sans équivalent, poursuit le propos du cinéaste, le miracle est davantage social que scientifique.
Redécouvrir la terre, l'eau, les parents, la professeur, c'est s'individualiser.
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Créée
le 23 nov. 2021
Critique lue 39 fois
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