Vous avez tous vu un jour un film qui raconte l’arrivée de la petite provinciale à Hollywood, les dessous du métier, les débuts difficiles, le succès, la grosse tête, la fin du succès, la rédemption (ou pas) et tout le tintouin… Vous savez bien, Une étoile est née, histoire intemporelle, ils vont même nous en ressortir une nouvelle version très bientôt…
Et bien, celui-là, c’est le plus vieux du genre que j’ai pu voir et c’est par Vidor, autant dire que, quitte à en choisir un seul…
Bon, je vois, vous vous méfiez, Vidor, c’est une très longue carrière (la plus longue semble-t-il d’ailleurs, vu qu’il tourne pendant soixante-sept ans, le bougre…) et il y a de tout, je dois le reconnaître, mais là, nous sommes plus ou moins juste entre La Foule et Hallelujah, je vous assure qu’il y a plus mauvais moment pour faire sa connaissance.
Le film baigne d’ailleurs dans un ton beaucoup plus léger que ses illustres collègues, on sent que Vidor s’est beaucoup amusé à tourner l’envers du décors, à mettre des caméos un peu partout (et lui-même, quitte à faire…), à profiter de ce récit inspiré de la carrière de Gloria Swanson pour se moquer sans vergogne des caprices de stars, des passés reniés, du snobisme dramatique anti-comédies, de la cantine des studios, des réalisateurs excentriques et mille choses encore…
Il y a une vraie tendresse dans ce portrait en demi-teinte, on sent qu’il adore toute la période des tournages de Mack Sennett, et les heureux lecteurs de The Name Above the Title de Frank Capra comprendront cela sans peine, du coup, c’est mignon, il y a une flopée de détails merveilleux encore frais, le muet n’est même pas terminé faut dire, on a tous envie de les rejoindre, William Haines à l’air gentil comme tout, même en soldat tout droit sorti de La Grande Parade, et c’est difficile de pardonner à cette pimbêche de Marion Davies de le repousser quelques fois…
Marion Davies, vous la connaissez tous, enfin, sans jamais l’avoir vu dans un film, mais si voyons, en cherchant bien…
Marion Davies, c’est la maîtresse de William Randolph Hearst (qui produit bien entendu le film), celui-là même qui appelait son intimité Rosebud dans l’intimité, me glisse-t-on à l’oreille, même que ça donnera peut-être des idées de film…
Et bien Marion elle n’est pas si mal, elle joue bien les pimbêches snobs et sait très bien comment redevenir toute fraîche la seconde qui suit… Et faut pas croire, très mal jouer comme elle le prétend au début, ce n’est pas si facile que ça…
Bon, après, ils sont capables de tout… pour bien nous persuader que c’est une star comme les autres apparitions, les Charlie Chaplin, Douglas Fairbanks, John Gilbert et j’en oublie, ils font même jouer à la petite un caméo en Marion Davies, ce qui est d’ailleurs terriblement mignon en plus d’être diantrement machiavélique…
Un film absolument charmant, donc, bourré de détails impossibles à retranscrire même dix ans après, débordant de clins d’œil qui m’ont probablement échappé par centaines, riche en gags et rebondissements les plus variés, enfin, un vrai petit bijou...
Et puis surtout qui n’a jamais rêvé de voir un jour à quoi ça pouvait bien ressembler, un tournage de film burlesque, un vrai, avec les bathing beauties, les chutes, les tartes à la crème, les keystones cops, les poursuites, le siphon à eau de Seltz, les chaises qui volent et un très émouvant plongeon final…