8 ans que nous étions sans nouvelles de l'argentin Damián Szifron depuis son électrique et jubilatoire "Les Nouveaux Sauvages". Et comme beaucoup de latins avant lui (Del Toro, Cuaron, Bayona,..), c’est via Hollywood que Szifron revient aux affaires avec "Misanthrope".
Prenant pour cadre la traque d’un tueur de masse, "Misanthrope" récite parfaitement son petit thriller illustré. Inspirée par David Fincher, la mise en scène racée travaille des cadres millimétrés et la photographie de Javier Julia des noirs aussi profonds que les âmes des protagonistes.
Le prologue, scotchant de brutalité (au même titre qu'une séquence tétanisante en milieu de film), annonce immédiatement la couleur par une maitrise totale de son découpage et l'installation d'une tension suffocante. Si la suite du film déroulera une enquête accrocheuse mais plutôt attendue, c'est dans le profilage du tueur que Szifron instille son pas de côté par rapport au genre investi.
Au détour d'un plan, d'une scène ou d'une réplique, il écorne ainsi régulièrement une culture de la violence très américaine (port d'arme, starisation des tueurs, conflits d'intérêts...) pour la renvoyer dos à dos avec les motivations de son antagoniste. Motivations malheureusement explicitées longuement lors d'un dernier acte qui dessert le film tant il déplie lourdement sa critique jusqu'ici larvée.
"Misanthrope" pêche donc par quelques bafouilles d'écriture dans son dernier tiers mais a suffisamment d'atouts pour les contrebalancer. Outre ses qualités plastiques, le film dessine également des beaux personnages qu'un casting investi prend plaisir à faire interagir.
En sus, "Misanthrope" est un exemple trop rare d'une production en désuétude : les films du milieu. Soit des films suffisamment commerciaux pour obtenir un budget décent mais pas assez gros pour que le réalisateur soit harcelé par les costards-cravates.
Rien que pour ça, le soutien en salles de ce solide petit thriller est nécessaire. Dépêchez-vous cependant, ses jours sont comptés !