Si Théorème de Pasolini et Phantom Thread de PTA avaient un enfant illégitime, gay et un peu weirdo, il s'appellerait probablement Miséricorde.
Un père meurt, un homme rentre dans son village natal, et soudain les cartes sont rebattues, la libido excédentaire doit trouver à s'investir : voilà le manège du désir relancé pour un tour.
Le père c'est le boulanger du village, et sa mort change tout (plus de pain, plus de rien, on ira au Leclerc, le pain n'est pas bon mais y a tout là bas : c'est l'histoire de la vie), brise quelques digues. L'homme c'est Jérémie, un ami du fils du boulanger. Mais d'emblée ce qu'il vient faire ici n'est plus si clair, et ses liens avec le mort apparaissent troubles : que lui voulait-il ? comment l'aimait-il ?
À partir ce trouble initial, de cet étonnant "che vuoi ?" irradiant du coeur (battant ?) de la boulangerie, chacune des relations sera méthodiquement réinterrogée. Qu'est ce qu'il leur veut après tout, à la veuve chez qui il loge, à son fils Vincent ami de jeunesse, à ce voisin perdu de vue qu'il vient trouver, au prêtre qui observe ce complexe ballet désirant..? Et surtout que lui veulent-ils ?
Jérémie mène-t-il perversement la danse ? Ou est il autant que les autres ballotté, malmené, par les fluxs désirants ?
Certaines questions semblent se résoudre, mais toujours subsiste le trouble : c'est probablement ce qui fait de Miséricorde un excellent film. Les hommes y apparaissent pour ce qu'ils sont : jouets et acteurs de leur désir, perdus pas si perdus, faibles, insuffisants, et magnifiques. De toute façon, il faudra bien vivre avec.