Un jeune garçon mal dans sa peau. Un établissement pour enfants très spéciaux. Une Eva Green en directrice badass (ou du moins qui le semble). Les éléments du dernier film de Tim Burton n'avaient rien d'originaux, il faut l'admettre. Le synopsis, par contre, laissait planer son lot de mystère, dans lequel se mêlaient boucles temporelles, monstres tentacules (j'adore les tentacules), et Samuel L. Jackson cabotinant au meilleur de sa forme.
Depuis l'erreur Dark Shadows, j'avais quelque peu abandonné Burton sur le bas côté, n'attendant plus forcément grand chose du cinéaste. L'essence poétique et gothique, maîtrisé, de ses films comme Edward, Big Fish, et Ed Wood pour ne citer qu'eux, semblait disparaître au profit d'un style mercantile. Burton parodiait Burton pour attirer les spectateurs voulant voir du Burton, à croire que le monsieur devenait un genre cinématographique à lui tout seul.
Puis, survint l'annonce de Miss Peregrine. Une bande-annonce, avec Sainte Eva Green en protectrice de bambins dotés de pouvoirs face à des démons. La poésie gothique allait-elle refaire surface? Tim Burton allait t-il enfin renaître de ses cendres, tel le Phoenix, et sauver son cinéma?!
Non.
En voulant adapter la trilogie romanesque de Ransom Riggs, Burton cherche à mêler, dans une ambiance se voulant sombre et torturée, la question de l'enfance et de la recherche de soi. Explorant dans un premier lieu cette thématique à travers le fil rouge entamé par
la mort du grand-père Abe,
Burton se contente survole le sujet par la suite en privilégiant le spectaculaire à l'intimiste, préférant faire la démonstration des pouvoirs de chacun plutôt que de s'intéresser aux conséquences de ces dons. Chaque protagoniste, jeune comme vieux, est présenté comme ayant ses forces et ses faiblesses, mais ces caractéristiques paraissent vaines tant le réalisateur éclipse ces éléments au profit d'une succession d'événements n'ayant point forcément de rapport entre eux. Censés faire avancer le récit, ces séquences n'arrivent qu'à rendre le corpus scénaristique brouillon. Voulant aller trop vite, sans prendre le temps de développer ses personnages, l'identification vis-à-vis de ces derniers est inexistante. Les rapports qu'ils entretiennent (la relation amoureuse entre Jake et Emma en tête) sont dénués de toute évolution, à tel point que certains sentiments sonnent faux due à leur apparition soudaine. Quant au personnage de Miss Peregrine, cette dernière est abordée très brièvement. Si dans un premier temps, ce traitement parvient à introduire une dose de mystère et d'interrogations quant au personnage, Burton abandonne finalement sa protagoniste principale en cours de route, préférant ne faire de la madame qu'une simple ange gardienne pleine de bonté maîtrisant l'espace temps, et évacuée de toute ambiguïté. Les personnages, caricaturaux, semblent être disséminés aléatoirement au sein du film selon le bon vouloir du réalisateur, ce dernier tâchant d'arriver le plus rapidement possible au final, lui aussi trop vite résolu.
Pourtant, la mise en scène burtonienne est source d'excellentes idées, à l'instar de la "bataille" des squelettes face aux Sépulcreux, hommage à feu-Ray Harryhausen, ou de la gestion de l'espace au sein du manoir, d'inspiration gothique et expressionniste, grande habitude chez Burton. Mais une belle esthétique ne parvient pas à sauver l'histoire, Tim Burton essayant de caser trop de problématiques et de personnages en deux petites heures.
En dépit de ses qualités esthétiques, Miss Peregrine ressemble à un beau gâteau au yaourt 0%. C'est beau à voir, mais le goût reste fade.