Premier film qu'il tournera avec des fonds hollywoodiens, Missing permet à Costa-Gavras d'aborder l'histoire vraie de la disparition d'un journaliste américain suite au coup d'État d'Augusto Pinochet contre le président chilien Salvador Allende.
Missing renvoie directement aux films politiques qu'il avait jadis tournés avec Yves Montand (Z, L'Aveu mais surtout État de Siège) et ici, il nous immerge en Amérique du Sud pour y suivre la recherche, par le père et la petite amie, du disparu. Il prend son temps pour bien nous imprégner de l'atmosphère de plus en plus troublante qui a envahi ce pays depuis le coup d'État, mais aussi l'apparition du père et le début de l'enquête.
Une enquête particulièrement passionnante, où ils vont tomber dans plusieurs pièges et naviguer entre mensonge, violence et rapport suspect, Costa-Gavras n'oubliant pas d'y inclure une dose de tension de plus en plus forte. Le metteur en scène d'origine grecque met en avant les liens entre les USA et les récents événements qui ont eu lieu au Chili, mais aussi l'horreur et les immenses défaillances d'un système de dictature, ici militaire. Il ne tombe jamais dans l'excès ou la caricature mais trouve toujours le ton juste et le bon équilibre, sachant retranscrire toute l'émotion, l'horreur et la pertinence liés aux enjeux et personnages. Sans pour autant atteindre celle de sa trilogie politique avec Montand, il donne une vraie et forte dimension politique à son oeuvre, sachant nous immerger au cœur du destin et quête des personnages, et d'y ressentir les mêmes sensations, notamment sur les rapports père-fils.
La réussite de Missing vient aussi des portraits de personnages qu'il dépeint, surtout le père qui va vivre un véritable voyage initiatique, lui un américain conservateur qui va peu à peu découvrir les dérives de son pays et changer de regard sur tant de sujets au contact de sa belle-fille. Ils bénéficient tous deux d'excellentes interprétations, que ce soit Sissy Spacek mais surtout Jack Lemmon, qui a toujours été un acteur formidable, tant dans des rôles comiques (fabuleux chez Wilder) ou plus dramatique, comme il l'avait déjà montré par le passé et à nouveau dans Missing où il offre une composition sensible et d'une incroyable justesse, d'ailleurs récompensée au festival de Cannes.
Palme d'or 1982 (ex æquo avec l'excellent Yol d'Yılmaz Güney), Missing permet à Costa-Gavras de mêler politique et drame où, dans un contexte fort, il va nous immerger aux côtés des personnages pour découvrir et ressentir les mêmes choses qu'eux. Brillant et une oeuvre dans la lignée de sa trilogie politique avec Yves Montand.