Moi, efficace mais c’est tout
Le film précédent m'avait suffisamment convaincu pour que je jette un oeil sur ce deuxième opus. Bon, aller au cinéma pour le faire était tout à fait facultatif, le film gagne assez peu, je pense, à être vu sur grand écran. Il se situe dans la droite lignée du précédent, et globalement le plaisir pris durant cette heure et demie est le même. L'animation, bien que manquant parfois de relief – un peu plat au niveau des couleurs, un certain manque d'onirisme peut-être ? – reste de la qualité qu’on peut attendre d’un studio (Universal Pictures) qui y met les moyens (plus de 70 millions de dollars, tout de même). Après tout, au vu de l’enjeu du film, l’ambition d’une animation réellement innovante ou qui tirerait vers quelque chose de plus abstrait risquerait d’être superflu ou de faire gadget arty. Mais il suffit de repenser à « Là-haut » avec ses ballons multicolores pour se dire qu’on peut mettre un peu de rêve et d’esthétique sans dénaturer le sujet du film.
Ce deuxième opus consacre donc Gru en père de famille qui, après avoir été transformé par ses gamines et n’avoir su résister à l’attrait de la paternité, se retrouve du côté des gentils. Rien de très original dans la situation de départ, le personnage désire « se ranger » dans une vie (presque) ordinaire de père commerçant, mais le passé ressurgit de multiples façons : rappel de ses aventures de l’épisode précédent, confrontation à un ancien confrère… Dans cette suite se met en place un double enjeu : la construction d’une famille à laquelle manque la mère pour être complète (vision malheureusement assez « straight » sinon réac du sujet : l’homme a besoin d’être en couple, sans quoi l’instabilité demeure) et la parodie de film d’espionnage visant à démasquer le méchant et à sauver le monde.
Si la partie « action » est globalement réussie, avec ses multiples rebondissements, ses explosions, la partie « famille » l’est moins, plutôt là pour servir la première alors qu’elle aurait pu faire l’objet d’un traitement plus intéressant. Elle ralentit l’intrigue parfois de façon maladroite, en arrivant comme un cheveu sur la soupe. Mais surtout, les personnages sont présentés de manière trop superficielle pour que le choix se justifie et fonctionne. En dépit des flashbacks sur l’enfance de Gru, de la répercussion de celle-ci sur son comportement vis-à-vis de Margo (qui, bien sûr, tombe amoureuse du gosse du méchant) et du passage plus amusant du speed dating avec une blonde tout ce qu’il y a de plus caricatural, rien n’est réellement intéressant et tout semble vouloir déboucher sur la conclusion que Lucy est nécessaire à la fois à l’équilibre de la famille et à Gru qui peut ainsi retrouver confiance en soi et sauver le monde. Autre personnage qui aurait mérité un meilleur traitement, c’est « El Macho ». Le fait qu’il soit écarté pour un temps des suspects et que ce soit finalement les motifs personnels de Gru qui permettent de l’identifier n’est pas inintéressant, mais – et bien que l’idée qu’un hispanique désire acquérir un sérum qui fait pousser les poils soit séduisante – la superficialité reprend le dessus : aucune motivation autre que celle d’une vengeance pas vraiment mise en scène, aucune relation avec Gru autre que celle de son fils avec Margo…
Reste un film amusant, où les sourires sont réguliers, assez court pour ne pas trop lasser malgré ses quelques longueurs, qui parodie efficacement le film d’espionnage avec quelques clichés assumés. La réutilisation des ingrédients ayant fait le succès du premier est judicieuse, même si on fait presque une overdose des « minions » ou d’Agnès, le marketing est bien géré pour attirer le public. Un peu à la manière de Scrat dans « L’âge de glace », des personnages annexes deviennent les principaux attraits du film. Mais quid du spin-off destiné à placer ces « minions » justement au cœur d’un film ? Là où ils sont efficaces en arrière-plan et ajoute quelque chose à « Moi, moche et méchant », il faudra savoir renouveler l’approche pour faire un film qui ne soit pas une succession d’apparition plus ou moins drôles (même difficulté à faire un long-métrage centré sur Scrat).