Un an après la sortie du dernier film de Xavier Dolan, j’ai décidé de revenir sur mes propos de l’an dernier, que je considère comme peu pertinents, n’effleurant que la surface du produit clipesque qu’est Mommy. C’est donc un avis mis-à-jour que vous lirez ici.
Il est peut-être bon aujourd’hui, un an après la sortie publique de Mommy de revenir sur ce qui est aujourd’hui le plus grand succès d’un jeune réalisateur qui en est d’ores et déjà à son cinquième long-métrage. De voir aussi que si celui-ci a autant de succès actuellement, c’est parce qu’il s’est donné la peine de s’abaisser au niveau du public, de lui proposer le produit qu’il attendait, rodé exactement pour lui. Car il n’a jamais été question de cinéma dans Mommy, et pas plus d’un discours ou d’une idée que le réalisateur aurait souhaité élaborer sur 2h10. Ou bien - si l’on considère qu’il y en a une - ce serait celle de mettre en scène le petit peuple en difficulté pour remettre en valeur sa capacité à s’élever au-dessus de sa condition sociétale, que le système s’évertue à maintenir au plus bas. De la sorte, Mommy se définit comme un film ponctué par des hauts et des bas, ce qu’il se contentera de faire deux heures durant, mettant en scène un couple, puis un trio traversant les affres de la vie. Un moyen simple et opportuniste de se mettre le public dans la poche par la conséquence logique de scènes dramatiques intenses et bouleversantes.
Mais à travers ces scènes de cris et de pleurs, c’est l’absence totale de jeu qui se fait ressentir, l’absence de vie car Dolan sacrifie toute sa dramaturgie sur l’autel du mouvement, de l’intensité.
Dolan se persuade que plus ses personnages hurlent, pleurent ou dépriment et plus le public ressentira la même chose, se servant de la voix comme un clip se sert de la musique pour créer un raccord, provoque une sensation. Le film n’est d’ailleurs qu’un gadget, une application à la lettre de toutes les techniques cinématographiques susceptibles de créer un impact, du ralenti à l’explosion du quatrième mur, facile et répandue. En considérant son film comme un moyen, une technique, Dolan sacrifie toute sa dimension dramatique et politique (contextualisé dans un futur incertain, moyen de ne pas aborder le sujet qu’il devrait aborder) pour s’abaisser au niveau du public qui attend sa nouvelle idole, un auteur aux grandes revendications. Mais des revendications, il n’y en a aucune, tout comme il n’y aucune forme de cinéma dans cette production dénuée d’ambition et d’intelligence.
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